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Fin annoncée du Coup de pouce Isolation : coup de froid sur la profession

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] C’est avec stupeur que les professionnels de l’isolation ont découvert, dans les projets de textes-cadres de la 5e période des CEE, que la bonification du « Coup de Pouce Isolation » pourrait disparaître dès le 1er juillet 2021. Un arrêt précoce, jugé trop brutal par la Fédération française du bâtiment ou par le syndicat de la rénovation énergétique. Réactions.

Le 1er février dernier, la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) du ministère de la Transition écologique, a présenté son projet de texte concernant l’évolution des Certificats d’économies d’énergie (CEE) pour la 5e période qui débutera en 2022. Il est notamment prévu de réduire drastiquement le système de bonification des CEE, qui survalorise certains gestes et permet de réduire le reste à charge des ménages. Et il est également prévu de stopper, de façon anticipée dès le 1er juillet 2021, les « Coups de pouce » pour les travaux d’isolation, d’installation de chaudières à gaz THPE et d’émetteurs électriques performants. Un revirement de plus dans la politique publique des aides à la rénovation que déplorent plusieurs acteurs du secteur.

La Fédération Française du Bâtiment déclare : « Cet arrêt brutal et imprévu aura des conséquences délétères pour de nombreux entrepreneurs et artisans du bâtiment qui se sont structurés pour répondre au marché, avec des emplois à la clé. C’est aussi un frein considérable à la popularisation des travaux de rénovation énergétique ». Symbiote, le syndicat de la rénovation énergétique justement, renchérit : « Ce dispositif permet à ce jour aux particuliers de réaliser des travaux de rénovation de leur habitat pour 1 € seulement (…) Une décision est attendue à la fin du mois de février sonnant le glas d’ici fin juin 2021 pour les coups de pouce liés aux financements des actions d’isolation partielles concernant planchers et combles, rénovation des chaudières gaz et électriques ! En découle un enchaînement de mauvaises nouvelles pour l’emploi, l’environnement et l’économie du secteur au niveau local, régional et national ». Le Syndicat estime que 10 000 emplois directs et 40 000 indirects seraient menacés. Avec le ralentissement ou l’arrêt de ces travaux, les pertes pourraient monter à 200 M€ d’investissements en moins pour la filière et 1,3 Mrd € de chiffre d’affaires perdu pour les entreprises.

Des Coups de pouce efficaces ou pas ?

Benoît Dulac, le président du groupe Les Eco-Isolateurs s’interroge même sur « Qui veut tuer l’isolation en France ? » dans une tribune. À propos de la fin anticipée du « Coup de pouce Isolation », qui le concerne au premier chef, il écrit : « Ce dispositif a pourtant permis de lancer la massification des travaux d’isolation en France. Le stopper net, sans la moindre concertation avec les entreprises de l’isolation et de l’isolant, c’est prendre le risque de détruire entre 5 000 et 10 000 emplois, de précipiter vers la faillite des entreprises qui depuis plusieurs années recrutent dans les territoires, forment leurs collaborateurs à de nouveaux métiers – non délocalisables – et investissent massivement afin de proposer des offres d’isolation performantes et accessibles ». Selon lui, cette aide « bien qu’imparfaite, a déclenché la première et unique massification des chantiers d’isolation en France ». Il s’appuie sur les propres chiffres de la DGEC, à savoir 1,5 million de logements ayant bénéficié d’une isolation des combles ou des sols entre janvier 2019 (date de mise en place du « Coup de pouce ») et décembre 2020. Benoît Dulac déplore « d’incessants changements réglementaires, réduisant fortement la capacité des entreprises d’isolation à mener leur mission » avant de citer : « Le Crédit d’impôt pour la transition énergétique a fusionné le 1er janvier 2020 avec l’aide Agilité de l’Anah devenue MaPrimeRénov’ ; mais avec des primes rabotées et des restes à charge d’au moins 10 % du montant des travaux. En juillet 2020, les surfaces éligibles ont été plafonnées à 100 m². Depuis, les réticences des ménages – notamment les plus modestes – à engager des travaux sont devenues fortes. Le rythme des mises en chantiers a été très faible avec environ 15 000 primes payées en 2020 pour l’isolation ».

Le professionnel préconise que la générosité des aides publiques soit mieux corrélée à un contrôle afin d’éviter les abus et rassurer les Français sur la qualité des interventions. Il suggère que les inspections soient aléatoires pour les chantiers les moins onéreux avec une fréquence de 1/3 et qu’ils deviennent systématiques pour ceux qui dépassent les 10 000 € d’aides. « L’Etat doit définir un schéma de subventions pour l’isolation des bâtiments contrôlé, incitatif, et pérenne, sans lequel les Français ne passeront pas à l’acte. Il est urgente de réagir, car la jeune filière française de l’isolation, composée de quelques rares ETI nationales et de PME régionales, est au bord du gouffre », conclut le président du groupe Les Eco-Isolateurs. De son côté Symbiote estime que le délai de 4 mois est trop court pour laisser le temps aux entreprises de s’adapter aux nouvelles directives. La FFB, quant à elle, réclame la pérennisation sur le long terme des dispositifs qui marchent, et « qui ont l’avantage d’être lisibles, tant pour les particuliers que pour les professionnels ». Une étude menée par l’économiste Matthieu Glachant (Mines ParisTech) sur l’efficacité des Coups de Pouce semble toutefois venir contredire les professionnels du secteur : sur toute l’année 2019, il estime en effet que l’apport de ce dispositif n’a été que marginal et n’a pas contribué à massifier les travaux de rénovation thermique. La DGEC en serait-elle venue aux mêmes conclusions ?

G.N.

Grégoire Noble
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