[Matériaux, composants : inflation & délais de livraison] C'est... l'alerte rouge dans le Bâtiment !
Bois, métaux, carburants, semi-conducteurs… : la flambée des prix touche tous les secteurs. Les pénuries menacent ! Et les industriels, distributeurs ou artisans s’organisent pour y faire face. Quelles sont les différentes causes de cette situation préoccupante qui pourrait entraîner des surcoûts et des retards de chantiers ? Et comment réagir ?
Principale organisation BtoB dans le négoce Bâtiment, la FDMC (Fédération des distributeurs de matériaux de construction) est en discussion quasi permanente avec les Pouvoirs publics pour tenter de trouver des solutions. Son président, Franck Bernigaud, ne veut pourtant pas mettre le feu aux poudres.
EN PHOTO • Franck Bernigaud préside la FDMC (l’ex-FNBM) depuis novembre 2016. Son deuxième mandat s’achèvera fin 2022.
FORTES TENSIONS SUR LES ACIERS
Franck Bernigaud : Depuis fin 2020, les prix d’achat des aciers bruts s’envolent avec des hausses de +20 % à +25 % ! Sur les aciers transformés pour la construction, le marché a pris environ +15 % au cours des quatre derniers mois… Il y a une conjonction de facteurs difficilement contrôlables qui s’agrègent ; notamment la bataille commerciale entre les États-Unis et la Chine sur de nombreuses matières premières pour soutenir leur croissance. Il faut y voir aussi un effet post-confinement 1. Tout au long du deuxième semestre, la filière Bâtiment a réussi à réaliser un relatif bon exercice 2020, dont un CA du négoce matériaux à seulement à -2 %. Dès novembre, lors de la préparation des bilans, la profession s’est retrouvée dans une situation de stocks relativement bas. Par ricochets, le jeu de l’offre et de la demande a sévi.
BOIS & DÉRIVÉS DANS L’ÉTAU
F. B. : Là aussi, les marchés mondiaux sont tendus. La demande est très soutenue. En France, la future RE 2020 pourrait aussi alimenter l’inflation. Sans doute faudra-t-il redimensionner l’offre en bois de charpente notamment en privilégiant, par exemple, les bois transformés tels que l’OSB. Le constat est similaire en électroportatif en raison d’une inflation sur les composants. Le négoce peut difficilement répercuter ces hausses, notamment auprès des clients du diffus.
UN QUOTIDIEN DIFFICILE À GÉRER…
F. B. : En fait, nos entreprises ont souvent peu de marges de manœuvre. Les prix annuels avec les fournisseurs sont fixés contractuellement. Il reste difficile, voire impossible de les renégocier. Notre profession est aujourd’hui soumise à une politique de quotas par son amont. Si la situation peut sembler ubuesque, les chefs de marché du négoce doivent jongler tant bien que mal avec toutes ces hausses successives. C’est un peu comme à l’issue des deux tempêtes de la fin 1999 où la distribution avait été confrontée aux booms des prix sur les bois et produits de couverture. La situation avait mis plus d’un an avant de se résorber.
…À L’ÉCHELLE EUROPÉENNE
F. B. : Dans les pays voisins, malgré des écarts tarifaires à la marge, la situation n’est guère différente. Certains de mes confrères se disent très inquiets. La FDMC s’est déjà entretenue mi-février avec des conseillers ministériels, notamment à Bercy. Le risque serait que ce phénomène inflationniste qui impacte les délais de livraison en entrepôts ou sur les chantiers, ne vienne ralentir, voire pénaliser une reprise d’activité… soutenue par le plan France Relance. À Bruxelles, la FDMC va notamment se rapprocher de l’Ufemat* et de son président anglais Peter Hindle pour définir une stratégie commune.
* Confédération européenne de 1_ unions BtoB de négociants en matériaux de construction et producteurs à laquelle adhère la FDMC.
En chiffres • La FDMC : “le” poids lourd du secteur
Avec 1 183 sociétés adhérentes, l’ex-FNBM qui s’est rebaptisée FDMC en janvier 2021 pour « gagner en visibilité », reste à ce jour la plus importante fédération du négoce Bâtiment. Elle représente pas moins de 5 500 agences et dépôts employant environ 78 000 salariés pour un CA total ventes de 19 Md€ en 2017.