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Climatisation, ventilation… propagation ?

Grégoire Noble
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[Zepros Energie] La transmission du SARS-CoV2 (coronavirus qui déclenche la maladie Covid-19) par l’air reste une épineuse question épidémiologique. L’hypothèse d’une accélération de la propagation par les systèmes de ventilation et de climatisation des établissements recevant du public est prise au sérieux par le Haut Conseil de la Santé Publique. Zepros résume les recommandations formulées par les plus hautes autorités sur l’utilisation et l’entretien de ces systèmes.

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La parution, le 2 avril 2020, d’un article scientifique dans la revue Emerging Infectious Diseases sur l’apparition de cas de Covid-19 dans un restaurant de Guangzhou (Chine) a été une première alerte pour le monde de la ventilation-climatisation. Schémas à l’appui, les scientifiques chinois émettent l’hypothèse qu’une patiente, située à une table, a infecté de nombreux autres clients de l’établissement au mois de janvier, pourtant attablés plus loin, et ce en raison de l’orientation du système de climatisation d’air. Les professionnels du secteur et les spécialistes de la santé se sont penché sur les solutions à apporter. Fabien Squinazi, médecin biologiste, ancien directeur du Laboratoire d’Hygiène de la ville de Paris et membre du Haut Conseil de la Santé publique, nous explique : « Nous travaillons sur le sujet, notamment pour la réouverture des bâtiments inoccupés depuis plusieurs semaines. Nous préconisons de vérifier, avant l’arrivée des occupants et de porteurs potentiels de virus, la conception et la maintenance des installations ».

Favoriser l’aération naturelle

Le médecin différencie les systèmes individuels et les unités terminales, qui brassent l’air de la pièce où ils sont implantés, et les installations collectives centralisées de plus grande puissance. Sur les premiers, l’expert souligne : « Par les mouvements d’air [ils] dispersent les gouttelettes virales dans la pièce. La question se pose d’arrêter ces équipements, comme les ventilateurs et brumisateurs ». Les recommandations de la fédération européenne du chauffage, de la ventilation et de la climatisation (REHVA) – traduites et reprises par l’AICVF* – sont de favoriser l’aération par l’ouverture des fenêtres, même au prix d’un léger inconfort, y compris dans les locaux équipés d’une ventilation mécanique, sauf dans les WC équipés de conduit à tirage naturel ou extraction mécanique, qui pourrait être à l’origine d’une inversion de la circulation.

Pour les bâtiments équipés de ventilations mécaniques, la fédération européenne préconise d’accroître l’amenée et l’extraction d’air, en étendant les plages horaires de fonctionnement. Ainsi, il sera nécessaire de maintenir 24h/24 et 7j/7 la ventilation, en abaissant le débit lors des périodes d’inoccupation, mais en fixant l’atteinte de la puissance nominale 2 heures avant l’ouverture des espaces et en retardant le passage à un débit moindre à 2 heures après la fin de leur exploitation. Les systèmes pilotés par la demande (concentration de CO2 dans l’air), il sera conseillé d’abaisser le point de consigne à une valeur inférieure à 400 ppm pour favoriser la ventilation. La REHVA note : « Compte tenu de l’arrivée prochaine du printemps, avec des besoins en chauffage et en refroidissement réduits, ces pratiques n’auront qu’un faible impact énergétique alors qu’elles permettront d’évacuer les particules virales du bâtiment et de les éliminer des surfaces où elles auraient pu se déposer ».

Attention aux filtres

Concernant les centrales de traitement d’air, Fabien Squinazi poursuit : « Pour les installations collectives, il faut désamorcer les systèmes de mélange air neuf-air repris, même si nous n’avons pas de certitude sur la viabilité des particules virales à distance ». La fédération européenne demande donc de désactiver la recirculation de l’air : « Il convient, lors des épisodes épidémiques, de fermer les volets de recirculation, soit par l’intermédiaire du système de gestion technique centralisé du bâtiment, soit manuellement. Cette action peut réduire fortement la puissance de chauffage ou de refroidissement de l’installation. Cela doit cependant être accepté par les occupants ». Si certaines recirculations sont équipées de filtres grossiers contre les poussières, ils ne sont pas considérés comme suffisants, ne présentant pas les caractéristiques HEPA nécessaires. De même, les ventilo-convecteurs et unités d’induction devront être coupés pour éviter la mise en suspension de particules virales dans une pièce. A noter qu’il serait possible d’inactiver le virus en portant la température d’alimentation à 60 °C pendant une heure ou à 40 °C pendant toute une journée… REHVA indique également de prendre en compte le risque de sédimentation du virus dans les filtres pendant un arrêt, avec remise en suspension au moment du redémarrage.

Au rayon des pratiques sans effet sur le coronavirus, les professionnels signalent que l’humidification et le conditionnement d’air n’ont pas d’action spécifique et ne constituent donc pas une méthode pour réduire la viabilité du SARS-CoV2. « Seules une humidité relative supérieure à 80 % et une température de plus de 30 °C peuvent avoir un effet sensible. Cependant, de telles valeurs ne peuvent être atteintes et ne sont pas souhaitables dans un bâtiment, notamment pour des raisons de confort et de croissance fongique ». Autre idée contre-intuitive : le nettoyage des conduites n’aura aucun effet pratique. La fédération européenne indique : « Le nettoyage des réseaux de ventilation n’est pas efficace contre la contamination pièce-à-pièce parce que le réseau de ventilation n’est pas, en soi, une source de contamination si les recommandations données plus haut, concernant les dispositifs de récupération de chaleur et recirculation, sont respectées ». Il ne sera donc pas nécessaire d’aller au-delà des procédures habituelles d’entretien. De même, le changement des filtres de l’air extérieur ne sera pas non plus demandé : « Les CTA des installations modernes de climatisation sont équipées de filtres plus performants, juste après la prise d’entrée d’air qui filtrent très bien les particules fines de l’air extérieur. La taille des particules du coronavirus (de 80 à 160 nm) est plus petite que la maille de passage des filtres F8 (efficacité de 65-90 % sur les PM1) mais la plupart des particules se dépose sur les fibres du substrat filtrant sous l’effet de mécanismes de diffusion ». Compte tenu de la possibilité de présence de matériel microbiologique et viral actif, il sera recommandé de ne procéder au remplacement qu’en cas de nécessité, avec système à l’arrêt et équipements de protection pour le personnel de maintenance. De son côté, Uniclima, le syndicat des professionnels des industries thermiques, aérauliques et frigorifiques, rappelle les exigences réglementaires de contrôle des installations avec l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars, qui suspend les délais, puis le décret n° 2020-383 du 1er avril, venu préciser le maintien de certains d’entre eux. « En tout état de cause, la sécurité des personnes reste primordiale et ne doit pas être remise en cause, les contrôles prévus doivent être réalisés autant que possible », soutient le syndicat.

Enfin, les experts de la CVC européenne estiment que certains purificateurs d’air pourraient s’avérer utiles, s’ils sont munis de filtres HEPA ou d’un principe de filtration électrostatique. « Cependant, du fait des débits d’air limités, les purificateurs d’air ne peuvent traiter que des pièces de surfaces réduites, typiquement de moins de 10 m² (…) Les équipements spécifiques utilisant des UV destinés à être installés de façon fixe pour traiter l’air neuf ou pour le traitement in situ de locaux, sont aussi efficaces car ils détruisent bactéries et virus, mais l’application de cette technique n’est réellement souhaitable que pour les établissements de santé », écrivent-ils. Le début d’une solution ?

Grégoire Noble

* AICVF : Association des ingénieurs et techniciens en climatique, ventilation & froid

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