Japet, l’exosquelette qui a le vent dans le dos
À l’occasion du salon Expoprotection qui s’est achevé ce 17 novembre à Paris, Japet Medical a (re)fait une piqûre de rappel en présentant son exosquelette. Baptisé Japet.W, la start-up lilloise définit ce dispositif actif comme « le futur de la rééducation de la lombalgie » chronique. Et réduire les postures à risque sur les chantiers entre autres.
C’est l’alliance des sciences médicales et de la robotique moderne. Si les exosquelettes ne sont pas encore entrés dans une véritable phase de déploiement, certains experts de la prévention et de la santé au travail estiment pourtant que ce sont de nouveaux outils et qu’il faut apprendre à travailler avec eux. But recherché pour les professionnels ? Favoriser la bonne posture des salariés qui souffrent du dos et sécuriser leurs gestes
Depuis sa création en 2015 par les ingénieurs Damien Bratic (spécialiste de la neurostimulation du mal de dos), Antoine Noël (expert en robotique) et Amélie Blondeaux (designer produits), Japet Medical Devices fait de plus en plus parler d’elle.
En juin 2017, parmi trente-quatre autres start-up européennes, la medtech nordiste avait été distinguée lors d’une cérémonie organisée à la Station F (Paris) par le magazine américain MIT Technology Review*. Son premier prototype baptisé Atlas permettait de « réentraîner les muscles et d’étirer la colonne vertébrale… sans douleur », expliquaient alors ses concepteurs.
* Le MIT Technology Review est une revue scientifique publiée par le département média de Massachusetts Institute of Technology (MIT).
En janvier 2017, lors du Consumer Electronics Show (CES), Japet Medical avait dévoilé un prototype d’exosquelette alors baptisé Atlas.
Après plusieurs levées de fonds dont le montant a atteint jusqu’à 2,2 M€, la medtech lilloise a conçu et mis au point Japet. W, une ceinture dite « bionique » destinée à diminuer les pressions exercées sur la colonne vertébrale afin de limiter la compression lombaire.
Les trois cofondateurs s’appuie aussi sur l’expertise de Fahed Zairi – un neurochirurgien au CHU Roger Salengro, à Lille – qui pilote la direction scientifique des projets. Doté de quatre micromoteurs (sept heures d’autonomie pour une utilisation en continue), l’exosquelette actif n’allège pas le poids ressenti de la charge portée, mais il limite l’impact des manutentions de charges sur les lombaires.
Du (quasi) “Made in Lille”
Selon ses concepteurs et à l’issue de tests menés notamment à l’Hôpital Foch de Suresnes (Hauts-de-Seine), Japet.W peut absorber jusqu’à 40 % du poids des charges sans gêner la cadence de travail de son utilisateur. Avec un argument de poids : la légèreté du système (moins de 2 kg) et une taille ultra-compacte.
Sur son site internet, la PME souligne d’ailleurs qu’« afin d’apporter une solution qui s’intègre au quotidien de l’utilisateur, Japet a développé une technologie robotique unique intégrée à un ensemble textile assurant confort et adaptabilité ».
Ce qui fait régulièrement dire aux dirigeants de la PME que l’exosquelette pourrait tout à fait se porter sous un pull sans même qu’on ne le remarque. Au total, plus de 500 composants entrent dans la conception de cet exosquelette fabriqué près de Lille. Environ 80 % des pièces (batteries, électronique…) viennent d’Europe. Le textile, lui, provient de Comines, au nord de Lille.
8 000 €
C’est le coût moyen estimé d’un accident de travail lié à une lombalgie pour une PME.
Distingué par “France 2030”
Commercialisée depuis fin 2019, la solution de Japet a déjà séduit plus de cinquante sociétés issues de marchés variés tels que l’industrie navale, l’aéronautique et le ferroviaire, la grande distribution, les Ehpad et le BTP : Airbus, Décathlon, Engie, Eiffage, Naval Group, la SNCF, le logisticien Log’S ou encore les cépages de Château Margaux. Pour un total de plus de cinq-cents utilisateurs à ce jour.
Exposant sur le salon Expoprotection 2022 (15-17 novembre, à Paris), Japet et son exosquelette ont d’ailleurs été l’un des lauréats du concours national i-Nov 2022 qu’organise Bpifrance dans le cadre du plan gouvernemental France 2030. Une distinction qui lui a valu une dotation de 1 M€ !
Selon plusieurs cabinets d’analyse économique, le marché de l’exosquelette aurait de très beaux jours devant lui. Rien qu’en Europe, les ventes devraient bondir de 50 % à 55 % entre 2022 et 2026. À tel point que Japet prévoit de développer un modèle destiné au grand public. Serait-ce là l’une des solutions afin d’enrailler le cercle vicieux de la consommation d’antalgiques ?
La lombalgie en chiffres
• Une colonne raide et un dos peu musclé entraînent des lombalgies, empêchant celui qui en souffre d’effectuer les mouvements nécessaires à l’étirement et à la musculation.
• Selon un rapport de l’Assurance Maladie, cette pathologie serait la cause de près de 170 000 accidents de travail par an (20 % de tous les accidents) et coûte plus de 1 Md€ tous les ans à la branche Risques professionnels.
• D’après l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), plus de 65 % des salariés ont eu ou auront une lombalgie durant leur carrière professionnelle.