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Réforme du CITE : les professionnels dubitatifs

Grégoire Noble
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La transformation du Crédit d’impôt transition énergétique (CITE) en prime, réservée aux ménages précaires, est prévue pour 2020. D’abord annoncée pour le 1er janvier 2019, puis reportée à l’année suivante, il semble que cette évolution ne convainque pas les organismes professionnels. Plusieurs, comme la Fédération française du bâtiment (FFB), la Confédération de l’artisanat et petites entreprises du bâtiment (Capeb) ou le Syndicat des énergies renouvelables (SER), ont publié des communiqués précisant leurs attentes face à ce changement.
La Capeb note tout d’abord que l’évolution du dispositif paraît ambitieuse dans un laps de temps trop court. La prime proposée par le gouvernement serait « très complexe dans sa présentation », car modulée en fonction des revenus du ménage, de la région de résidence et de la typologie de logement (maison individuelle ou logement collectif). Un mode de calcul ardu qui « risque d’engendrer un manque de lisibilité », estime la confédération, qui réclame « un accompagnement spécifique des acteurs » pour que les professionnels soient informés et conseillés. Jacques Chanut, le président de la FFB, considère, lui aussi, que le calendrier est complexe. Quant au SER, il recommande que l’Agence nationale de l’habitat (Anah), qui se verrait confier le rôle de verser les aides, soit « dotée de moyens supplémentaires, notamment humains », afin de traiter rapidement la masse de dossier qui lui incombera. Il souhaite également qu’une période de transition entre le CITE actuel et la future prime soit décidée. Le syndicat argumente : « Il est, en effet, essentiel de ne pas modifier le régime de soutien au milieu de la saison de chauffe 2019-2020 ». Pour le SER, les opérations engagées jusqu’au 31 décembre devront pouvoir continuer à bénéficier du dispositif de crédit d’impôt, et rester éligibles jusqu’au 30 juin suivant, « à condition que les travaux de pose de l’appareil soient réalisés d’ici là ». Chez Effy, on s’alerte d’une « mise en œuvre trop rapide » et d’une « absence de moyens de lutte contre les fraudes ». Le groupe spécialisé dans la rénovation énergétique craint « un trou d’air au 1er semestre 2020 » lié à l’attentisme et l’incertitude autour des dossiers, et recommande lui aussi d’engager une période de transition « courant 2020 sur certains territoires » avant la généralisation au début de 2021.

Ne pas exclure les ménages les plus... riches


Autre demande des organisations : ne pas tout focaliser sur les ménages les plus modestes et les solutions d’entrée de gamme. La Capeb espère que les familles dont les revenus sont situés dans les 9e et 10e déciles soient maintenues dans le dispositif, « afin que ces ménages puissent continuer à participer au défi de la rénovation énergétique ». Pour le SER, il faudra être attentif « à ce que le futur système ne couvre pas l’intégralité du coût des travaux, sauf pour des ménages aux revenus très modestes », afin d’équilibrer le marché et d’éviter une concentration sur les solutions les moins onéreuses. Les professionnels soulignent que ces ménages des déciles les plus élevés « investissent massivement dans les énergies renouvelables et représentent, actuellement, près de 50 % du montant total de la réduction d’impôt obtenue à travers le CITE ». Même réserve pour la FFB qui avance que ces ménages plus aisés finiraient par privilégier de simples travaux d’embellissement au détriment de réelles rénovations thermiques. Jacques Chanut préconise de conserver les 9e et 10e déciles dans le cadre de travaux globaux, incorporant l’isolation des parois et/ou toitures. Sur ce point, la Capeb estime irréaliste le bond d’efficacité des étiquettes « F » et « G » à « A » ou « B » : « Au mieux, il faudrait prévoir un saut de classe vers D ou C ».
Côté technologies, les avis sont nombreux. Pour la Capeb, « le montant des aides prévues pour certains travaux (chaudière à gaz THPE, isolation des rampants de toiture...) n’est pas suffisant au regard des prix moyens pratiqués ». Elle demande donc de « réévaluer les montants forfaitaires pour les mettre en cohérence avec les prix de marchés » et « de veiller au rapport coût/efficacité des équipements », notant que les technologies les plus performantes risquaient de ne pas être favorisées, car généralement plus onéreuses. La FFB bataille également pour le maintien des chaudières à très hautes performances, en revoyant toutefois à la baisse le montant de la prime (600 € contre 1 000 € à l’origine). Le SER milite pour le maintien des appareils de chauffage au bois moins performants au contraire (type foyers fermés et inserts) et pour que les appareils à bûches bénéficient d’un soutien similaire à ceux fonctionnant aux granulés. De même, le syndicat propose de soutenir fortement l’achat et l’installation d’équipements géothermiques de surface, afin que cette solution efficace mais coûteuse, se développe en France. Pour l’association Équilibre des énergies, ce sont les radiateurs électriques performants (pilotés), qui devront être intégrés dans le CITE : « Cette prime, si elle reste alignée avec les taux actuels du crédit d’impôt, pourrait représenter une aide supplémentaire de 100 € pour les Français qui remplacent leur grille-pain par des radiateurs intelligents ». Elle estime qu’entre 4,4 et 5,8 millions de foyers seraient encore équipés de vieux radiateurs, représentant un parc à remplacer de 20 à 30 millions d’unités !
Toutes ces propositions seront discutées par le gouvernement dans le cadre du Projet de loi de finances 2020, qui déterminera in fine, les moyens dont disposera effectivement l’Anah...
G.N.
Grégoire Noble
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