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Matériaux : Bercy apporte un début de réponse face à la flambée des prix et aux pénuries

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] Les représentants de la filière construction (Capeb, FFB, FDMC…) étaient réunis ce mardi 15 juin au ministère des Finances à Bercy pour évoquer la difficile situation des entreprises face aux pénuries de matières premières et à la flambée des prix qui en résulte. Bruno Le Maire, Emmanuelle Wargon et Alain Griset ont apporté trois réponses à cette situation. Mais les organisations professionnelles en attendaient davantage – notamment Olivier Salleron (FFB) – et une autre réunion sera organisée dans les semaines qui viennent.

Tous les acteurs du bâtiment et des travaux publics étaient réunis autour du ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, de la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, et du secrétaire d’Etat aux PME, Alain Griset, afin d’étudier les réponses à apporter aux problèmes d’approvisionnement et de flambée des coûts de matières premières. Bruno Le Maire explique : « Il y a un effet ciseau entre une faible production en 2020 et une reprise plus rapide que prévu en 2021 qui conduit à des tensions très fortes et une explosion des prix ». Citant l’exemple de la tonne d’acier, qui est passée de 500 € l’an passé à 1 500 € aujourd’hui, le ministre ajoute que de nombreux matériaux sont concernés comme le zinc ou le bois, conduisant à un problème majeur pour toute la filière de la construction. « Les entreprises ne peuvent pas honorer les contrats signés. Des pénalités de retard seraient profondément injustes », poursuit-il, annonçant les trois mesures prises ce mardi 15 juin 2021.

Solidarité et gare à ceux qui ne joueraient pas collectif !

Première réponse avancée par Bruno Le Maire : « La solidarité entre les acteurs est impérative. Elle doit être le maître-mot parce qu’elle est la meilleure réponse, pour aménager les délais et les coûts ». Au-delà de ce premier principe, le ministre de l’Economie annonce l’envoi d’une circulaire aux acheteurs de l’administration d’Etat afin qu’ils n’appliquent pas de pénalités de retard dans le cadre des marchés publics. « Il s’agit d’un cas de force majeure », argumente le pensionnaire de Bercy qui demande à l’ensemble des collectivités locales de s’aligner sur cette politique. Dernier volet, la mise en place d’un comité de crise, présidé par Pierre Pelouzet (Médiateur des entreprises), pour « faire remonter les comportements anormaux et les abus qui doivent être signalés ». Le gouvernement annonce souhaiter utiliser la pratique du « name & shame » afin de dénoncer ces acteurs qui ne joueraient pas le jeu de toute l’équipe. Bruno Le Maire estime même qu’il s’agit là de la réponse la plus efficace possible.

Le chômage partiel : la pierre d'achoppement

Mais Olivier Salleron, le président de la Fédération Française du Bâtiment ne l’a pas entendu de cette oreille. Parti en premier, avant même la fin de la réunion, il s’est dit « très déçu ». Il espérait sans doute, comme son homologue de la Capeb, que la mesure de l’activité partielle soit utilisable par les chefs d’entreprises qui se heurteraient à la pénurie de matériaux mettant un chantier à l’arrêt. Bruno Le Maire a toutefois écarté cette possibilité : « Le chômage partiel sera réservé à des cas spécifiques. Nous préférons qu’elle reste dans le cadre sanitaire de lutte contre la Covid. Il est plus sage de ne pas rétablir ce dispositif. Mais toutes les demandes seront étudiées ». Interrogé sur une éventuelle tension avec le président de la FFB, le ministre a répondu : « La réunion a été très amicale et constructive », avant de poursuivre en signalant que les chiffres alarmistes de la fédération en 2020 qui pensait que 100 000 emplois étaient menacés alors que le secteur peine aujourd’hui à embaucher, demandaient de prendre la situation avec sérieux.

De son côté, Jean-Christophe Repon, le président de la Capeb, nous déclare que la réunion a été complexe car la crise dépend de multiples facteurs économiques internationaux que le gouvernement ne peut contrôler. Pour lui, les réponses apportées ce mardi 15 juin sont « un bon début de prise de conscience. Les marchés publics, c’est très bien. Mais qu’en est-il pour le diffus ? Avec les particuliers cela reste très compliqué », évoquant l’impossibilité de renégocier chaque devis avec les clients. Il rappelle que la confédération avait alerté les pouvoirs publics dès le mois de février sur le prix de l’acier, suite à une remontée de la part des serruriers-métalliers. L’activité est aujourd’hui ralentie par des délais de livraison rallongés ou des commandes annulées. Si la perte est difficile à quantifier et que l’impact se fera davantage sentir au 2nd semestre, il souligne que l’arrêt des travaux de charpente – faute de bois – stoppe immédiatement tout le chantier de construction d’une maison neuve et met de facto les autres lots au chômage technique. « Le gouvernement ne peut pas régler un problème de marché mais comment faire pour ne pas débaucher de la main d’œuvre qu’on a eu du mal à embaucher ? », s’interroge-t-il. Lui aussi réclame que la mesure du chômage partiel soit applicable afin de conserver les compétences au sein des entreprises. Dossier qui devrait en fait être traité par le ministère du Travail ? Et il espère que les industriels joueront le jeu, eux qui ont déjà répercuté des hausses de coûts au 1er janvier puis au 1er juin… L’AIMCC et la FIECC se disent prêtes à compresser leurs marges afin d’amortir cette hausse des prix.

Enfin Franck Bernigaud, le président de la Fédération des distributeurs de matériaux de construction (FDMC) a, pour sa part, estimé que « la réunion s’est bien passée ». Pour lui, « la filière reste unie pour surmonter cette crise. Le Médiateur des entreprises a proposé la création de deux outils, le comité de crise spécifique et une médiation de filière avec un médiateur délégué sur les sujets ». Il se félicite que les pénalités ne soient pas appliquées aux entreprises dont les chantiers prennent du retard. À noter que les promoteurs immobiliers demandent, pour ne pas appliquer de pénalités non plus, que les avantages fiscaux (ex-Pinel) soient prolongés dans le temps. Tout le monde réclame donc un geste des autres... mais surtout de la part du gouvernement.

G.N. & S.V.

Grégoire Noble
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