Avec un CA à -1,4 % en 2023, le marché du Bricolage fait de la résistance
Enfin des chiffres ! Depuis avril 2022, c’était disette. Mais, à l’occasion de la Journée mondiale du bricolage, la Fédération des magasins de bricolage (FMB) et Les Industriels du Nouvel Habitat (Inoha) ont révélé les chiffres 2023 concernant l’activité des GSB. Avec un recul de 1,4 % en valeur, mais plus sévère en volume.
Vendredi 24 mai lors de la présentation des statistiques 2023 du marché, c’est Caroline Hupin, déléguée générale de la FMB, qui a pris la parole en premier. Non pas en annonçant les résultats du marché 2023 sur le périmètre des GSB, mais en dévoilant un observatoire mis en place avec Viavoice sur “Les Français et le Bricolage”.
Une étude passionnante qui nous apprend entre autres que trois Français sur cinq se déclarent bricoleurs, sept sur dix se sentent compétents en aménagement, décoration et jardinage. En revanche, ils ne sont plus qu’environ 30 % dès que le bricolage devient technique : électricité, plomberie et menuiserie.
Le prix des produits ? C’est ce qui compte le plus pour 90 % des bricoleurs. Un critère talonné par celui des économies d’énergie (8 %) ; ce qui peut être une autre façon de se questionner sur les prix (voir encadré ci-dessous sur l’étude Viavoice).
Côté chiffres du marché 2023, Juliette Lauzac, responsable des études pour la FMB et Inoha, a présenté les données calculées sur le seul périmètre des GSB pour un chiffre d’affaires global d’environ 24 Md€ en expliquant qu’il s’agissait là d’un recul de 1,4 % en valeur comparé à 2022.
Avant de préciser qu’il faut aussi tenir compte dans ce chiffre d’un effet mécanique dû à l'inflation... d’au moins 4,2 points. Alors, tous comptes faits, le marché a sans doute reculé en volume de ventes d’environ 5,5 % en 2023.
En BtoC, le négoce a marqué le pas
Encore une fois, il ne s’agit pas du marché du bricolage au sens large, mais seulement de celui des GSB, car il manque environ 10 Md€ réalisés par les négoces auprès des particuliers, par les GSA et les pure-players. Sur ce point particulier, à l’exception des GSA justement qui auraient progressé en 2023 (certains acteurs de la filière évoquent un bond de +12 % !), négoces et pure-players auraient marqué le pas.
Bref, le marché du bricolage évalué à 34 Md€ en 2021 doit être un peu en retrait lui aussi en 2023. À lui seul, le bon résultat des GSA ne peut en effet sauver la mise dans la mesure où leurs ventes Brico ne pèsent qu’environ 1,2 Md€ sur ce marché.
Quand on décortique les 24 Md€ de 2023 – que la rédaction de Zepros Habitat a pris soin de recalculer à 23,847 Md€ exactement –, on note que la part d’achats en ligne (livré ou click & collect) dans le CA des GSB ne point qu’à 5,3 % ; soit environ 1,2 Md€.
Certes, la progression est +10 % comparé à 2022 en parts de marché car le web ne pesait que 4,8 %. Reste qu’il s’agit d’une stagnation vs 2021 : une période durant laquelle, l’activité web des GSB atteignait déjà 1,2 Md€. Curieux ? Oui et non, car ces chiffres ne tiennent pas compte du web marketplace/GSB, notamment celui de Leroy Merlin.
Résultats par rayons
En termes d’analyse par secteur, FMB et Inoha proposent une grille de lecture intéressante : l’analyse des travaux selon qu’ils sont nécessaires ou pur projet ou encore projet/plaisir en rappelant que, côté projet/plaisir, le brico était fortement concurrencé l’an dernier par les loisirs (restaurants, cinéma, voyages). Une sorte de rattrapage des années Covid qui était attendu.
L’analyse des évolutions de chaque rayons doit aussi se faire à l’aune du cours des matières premières. On verra, par exemple, que la baisse du CA des achats de câbles électriques ne s’explique pas forcément par moins de travaux électriques, mais simplement parce que le cours du cuivre baisse.
Selon Juliette Lauzac, la quasi-totalité des rayons limite leur décroissance par rapport à 2022 et reste en nette progression par rapport à 2019. Le rayon Peinture-Droguerie-Colles s’inscrit en première place des rayons qui progressent comparé à 2022 à +2,3 %.
« Pour autant, il n’atteint pas son niveau de 2020-2021, années durant lesquelles l’engouement pour ces petits travaux a été au plus haut. » S’ensuivent les rayons plomberie/salle de bains/cuisine (+0,7 %), quincaillerie (+0,1 %) et revêtement (+0,1 %).
Le rayon Bâtiment, lui, est révélateur de la montée en compétence des bricoleurs, selon la FMB et Inoha. D’autres y verront une progression de travaux plus ou moins pros, plus ou moins auto-entrepreneurs. En tout cas, cet univers a affiché une montée en puissance en 2021 (+17%) et un léger recul (-1 %) 2022, mais toujours à un niveau très élevé par rapport à 2019 (+33%).
Dans la même logique, les rayons Bois & Menuiserie (-1,6 %), Électricité (-2,0 %) et Outillage (-3,0 %) suivent une tendance à la baisse par rapport à 2022, mais se maintiennent à un niveau très honorable par rapport à 2019 : respectivement à +25 %, +17 % et +8 %.
« Concernant le rayon Jardin (-3,9 %), on constate un recul des familles Aménagement (-6,2%) et Plein Air (-13,3 %), note Juliette Lauzac. Deux facteurs expliquent cette tendance : le boom des projets d’aménagement de jardin en 2021 finalisés en 2022, et la météo-dépendance de ce secteur qui, après un épisode caniculaire en 2022, se retrouve confronté à une météo pluvieuse en 2023, météo qui a de son côté porté la famille Outillage motorisé qui s’est envolée à +11 %. »
Pour sa part, le rayon Décoration poursuit sa chute. C’est l'exemple même de l’univers produits concurrencé par les autres marchés des loisirs (restaurants, voyages…). L’activité s’est érodée de -4 % par rapport à 2022.
Le rayon Chauffage (-8,3 %) subit une correction après une forte progression l’an dernier (crainte de pénurie de chauffage). Parmi les produits remarqués par leur progression, tous rayons confondus, il faut souligner le boum des équipements en photovoltaïque et chargeurs (+10 %), des tondeuses autoportées en GSB (+21 %) ou encore des panneaux muraux de salle de bains (+29 %), des fenêtres en bois (+17 %). À noter : l’écroulement des ventes de groupes électrogènes (-40 %). Il est vrai qu’en 2022, les ménages s’étaient jeté dessus par crainte d’un black-out électrique général.
Adeo, c’est 1 € sur 2 € dépensés en GSB (ou presque)
Côté enseignes, comme les chiffres 2022 ne sont pas connus, la rédaction de Zepros Habitat a recoupé ceux de cette année en les comparant aux chiffres d’affaires de 2021 et 2019. Ce qui donne un premier résultat marquant. Le groupe Adeo – au sens large – s’approche désormais, peu ou prou, de la barre des 50 % de parts de marché du bricolage en GSB en France avec 48 % contre 44 % en 2019 ou 2021 (hors marketplace).
Une progression que le groupe doit à ses propres résultats (+4,15 % en deux ans), mais surtout aux bonnes performances de Bricoman et Weldom ; tous deux à +18 % sur la période. Pendant ce temps, Kingfisher voit ses part de marché passer de 27 % en 2019 à 26,2 % en 2021 et 24,7 % en 2023. Les groupes Mr.Bricolage et ITM maintiennent leurs positions, respectivement, à 8,3 % et 13,6 %.
Selon l’étude Viavoice, les bricoleurs apprécient leur GSB
Bonne initiative de la FMB qui lance son “Observatoire des Français et le bricolage” confié à Viavoice. Selon la fédération, il s’agit d’« un nouvel outil pour suivre le profil des bricoleurs, leurs pratiques, leurs motivations et leur perception du secteur ». En voici les principaux enseignements.
Étude menée auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 1 000 personnes de 18 ans et plus. Interviews réalisées en ligne du 1er au 4 mars 2024 dans un contexte marqué par le changement climatique, et comment l’écologie et la rénovation énergétique des logements s’intègrent dans les pratiques de bricolage des Français ?
ZOOM SUR LES PRINCIPAUX RÉSULTATS
Le bricolage : une activité démocratisée...
60 % des Français se déclarent bricoleurs et seuls 9 % ne bricolent jamais. Ce sont les hommes (69 %) habitant en maison (66 %) et propriétaires (65 %) qui s’identifient le plus comme bricoleurs. Mais le bricolage s’émancipe largement des stéréotypes de genre, puisque trois-quarts des Français estiment qu’il ne s’agit pas d’une activité́ masculine.
...mais pas dans tous les domaines
Sept Français sur dix se sentent compétents en Aménagement, Décoration et Jardinage. Néanmoins, ils sont trois sur dix à hésiter à se lancer dans des travaux en Électricité́, Menuiserie ou Plomberie nécessitant, eux, plus de compétences techniques.
Une activité permettant de réaliser des économies, mais aussi se faire plaisir
93 % des Français considèrent que le bricolage est un bon moyen d’économiser de l’argent, mais pas seulement : pour 7 sur 10, cette activité́ permet de prendre du plaisir, de s’évader ou de passer du temps de qualité en famille ou entre amis.
L’écologie joue des coudes avec le prix dans le choix des bricoleurs
Si le prix des produits reste une priorité pour 90 % des Français, ils sont 82 % à être attentifs aux économies d’énergies réalisées grâce au bricolage. Et 76 % à être attentifs à l’aspect polluant et toxiques des matériaux. Paradoxalement, seuls la moitié d’entre eux portent une attention aux labels écoresponsables apposés sur les produits.
Des Français qui fréquentent les GSB pour être conseillés…
Grande fierté pour les enseignes et leurs collaborateurs : 93 % des Français se rendent en GSB et sont très satisfaits des conseils apportés. 80 % jugent que les conseillers en GSB permettent de choisir le produit le plus adapté, d’apporter des conseils pour mieux bricoler et connaissent bien les produits vendus.
...notamment sur l’empreinte écologique de leur logement
45 % des Français se renseignent en GSB sur l’empreinte écologique de leur habitation. Ce chiffre, quasi-équivalent au pourcentage de renseignements pris sur les sites et forums spécialisés, et auprès des professionnels, démontre que les GSB sont des acteurs de référence dans le domaine de la sobriété énergétique des logements.
La rénovation énergétique des logements est devenue un sujet bien ancré
44% des Français et 55 % des bricoleurs ont déjà réalisés des travaux pour réduire l’empreinte écologique de leur domicile. 95 % des personnes ayant réalisé ce type de travaux se déclarent satisfaits ; et 50 % très satisfaits.
Un parcours client qui alterne entre GSB et internet
81% des Français déclarent se renseigner sur internet avant d’acheter en magasin, tandis que 60 % indiquent se renseigner en magasin avant d’acheter en ligne. Ces données montrent l’attachement des Français aux magasins physiques et la complémentarité des GSB et des sites internet qui, loin de s’exclure, se complètent mutuellement au sein du parcours client.
Les alternatives à l’achat de matériel neuf
La réparation aa la cote, mais la location et l’achat d’occasion sont encore peu considérés. Plus de la moitié des Français (54 %) et 60 % des bricoleurs ont déjà fait réparer leur matériel en panne plutôt que le remplacer. En revanche, seuls 28 % ont déjà loué un produit en GSB et 19 % acheté un produit d’occasion en GSB. Principal frein à la location ? La non-nécessité (38 %). Quant à l’occasion, le principal frein est le manque de confiance dans les produits de seconde main pour près de 30% des personnes interrogées.