
Conjoncture, transitions, IA, relation client : la vision du leader de la distribution

Olivier Mercadal revient pour Zepros sur l'actualité des 12 mois écoulés. L'occasion aussi de faire un point sur les chantiers en cours et à venir menés par Saint-Gobain Distribution Bâtiment France et ses enseignes. (Cet entretien est extrait de Zepros Négoce Spécial TOP100 2025 à lire ici)
Nous sommes plutôt confiants pour le second semestre. Plusieurs indicateurs passent au vert. Les facteurs à l'origine de la crise, comme la baisse du pouvoir d'achat immobilier, s'estompent progressivement. La baisse des taux d'intérêt est significative et pourrait se poursuivre. Les transactions immobilières reprennent, même si elles restent inférieures aux niveaux antérieurs. Et qui dit transactions dit souvent travaux.
Les crédits immobiliers progressent aussi, sur une base encore faible mais avec une forte dynamique. Les ventes de maisons individuelles rebondissent fortement en pourcentage, ce qui laisse entrevoir une amélioration. Nous assistons à un rebond, notamment dans nos enseignes comme Point.P, mais également dans d'autres réseaux.
Je ne peux prédire ni le calendrier exact ni l'amplitude, mais nous restons confiants. La grande question, c'est : rebond ou reprise durable ? Le rebond, assurément, et il pourrait durer plusieurs mois. La reprise, en revanche, dépendra du retour de la confiance.
Actuellement, nous partons de loin. Le climat politique, fiscal et géopolitique reste très particulier. Mais les choses peuvent évoluer vite. Si un cadre stable s'installe, cela pourrait transformer le rebond en une reprise solide, notamment dans la rénovation énergétique, qui est une nécessité absolue.
« Nous sommes confiants dans un rebond de l’activité au deuxième semestre. Quant à la reprise, elle reste à confirmer. Elle sera amplifiée si le climat de confiance est restauré. »
Pas uniquement. Beaucoup de projets de rénovation énergétique se font sans aides. Mais il est vrai que les dispositifs publics sont essentiels pour les logements les plus dégradés, notamment les logements classés F et G qui concentrent l'essentiel des besoins.
Le problème, c'est que ces logements sont souvent occupés par des ménages modestes, sans moyens suffisants. Les banques hésitent à financer ce type de travaux, car ce n'est pas leur cœur de clientèle. Il faudrait créer des produits d'épargne ou des dispositifs spécifiques, via l'État ou par d'autres acteurs.
Les aides comme MaPrimeRénov' sont bonnes sur le papier. Il faut bien distinguer deux objectifs : réduire la consommation énergétique et décarboner. La rénovation globale est plus efficace, mais aussi plus complexe et coûteuse. À l'inverse, remplacer une chaudière par une pompe à chaleur est très efficace en termes de décarbonation.
Le dispositif actuel est bien conçu, mais son exécution est perfectible. Je pense qu'on prend le problème à l'envers, notamment pour lutter contre les fraudes. Soit on met en place des contrôles avant les travaux, soit on contrôle après. Personnellement, je préfère les contrôles a posteriori. A condition d'avoir un diagnostic de performance énergétique (DPE) fiable, engageant la responsabilité des diagnostiqueurs.
Ensuite, il conviendrait de mettre en place un contrôle systématique de l’efficacité des travaux et instaurer un véritable système d’assurances garanties pour les artisans, pour couvrir les erreurs, sur le principe de la garantie décennale. Ce qu'il faut, c'est de la stabilité, de la simplicité, et laisser la filière s'adapter.
«Je suis plutôt optimiste pour 2025-2026. Si la stabilité persiste, la rénovation énergétique prendra enfin toute sa place.»
Nous intervenons à différents niveaux. Nous avons 2 000 points de vente de proximité, ce qui nous permet de contribuer à l'ancrage local. Nous souhaitons renforcer ce lien avec les territoires.
Nous souhaiterions aussi travailler plus avec des partenaires comme France Rénov' pour accompagner les particuliers. Notre stratégie consiste à orienter les particuliers vers des artisans qualifiés, dans une logique B2C2B.
C'est aussi la raison pour laquelle nous avons acquis La Maison des Travaux, qui est spécialisée dans les grosses rénovations et la rénovation énergétique. Cela nous permet de mieux connecter particuliers, artisans et agences.
Par ailleurs, nous avons aussi La Maison Saint-Gobain, qui opère comme un site d'inspiration pour les particuliers, offrant des idées et des solutions pour leurs projets de rénovation. Nous avons décidé de conserver cette plateforme pour renforcer l'apport d'idées et de solutions, tout en mettant fin à certaines activités d'intermédiation digitale qui ne correspondaient plus à notre modèle.
Nous visons un modèle gagnant-gagnant : d'un côté, nous proposons des solutions aux artisans et aux clients ; de l'autre, nous dynamisons nos ventes et renforçons l'écosystème local.
Nous avons toujours privilégié les acquisitions de proximité, et cela n'a pas changé. Nous avons poursuivi des opérations en 2025, notamment en Île-de-France, à Toulouse et en Bretagne.
L'acquisition de La Maison des Travaux s'inscrit dans cette logique, tout comme nos investissements passés dans des sites de mise en relation d'artisans pour le dépannage. Nous couvrons ainsi toute la chaîne de l'intermédiation, des petites interventions aux gros chantiers.

Notre stratégie s'articule autour de deux axes majeurs. Le premier concerne l'offre durable, notamment la réduction des émissions de CO2. Nous avons engagé de nombreuses actions avec nos fournisseurs, ce qui couvre environ 80 % de nos ventes. Nous travaillons sur la décarbonation de leur énergie, le recyclage et l'éco-conception.
Nous avons aussi lancé le label Agir, qui nous permet de mieux identifier les produits durables. Nous avons déjà labellisé une vingtaine de catégories de produits, ce qui représente environ 20 % de notre offre.
Nous avons également développé la solution Terlian, un matériau basé sur la terre d’excavation, qui offre une alternative innovante et décarbonée dans la construction, et en particulier pour le confort d’été. Terlian est conçu pour être facilement industrialisé et adapté à différents usages, allant de la construction neuve à la préfabrication, et la rénovation avec le carreau de terre. Plusieurs chantiers tests ont été réalisés avec succès, et nous croyons beaucoup au potentiel de ce matériau pour transformer les pratiques du Bâtiment.
Le deuxième axe, plus ambitieux, porte sur l'impact positif : comment créer une activité qui régénère, plutôt que de simplement réduire l'impact ? Cela implique des modèles économiques nouveaux, des services et une approche circulaire.
Nous avons déjà des initiatives concrètes, notamment sur le recyclage, qui est plus facilement industrialisable que le réemploi. Nous travaillons également sur des solutions d'impact positif dans nos agences, comme la réduction des consommations énergétiques, l'installation de photovoltaïque, l'usage de Led ou encore la modernisation des bâtiments. L'objectif est de réduire de 30 % la consommation électrique de nos points de vente d’ici à 2030, et nous avons déjà atteint -24 %.
« Travailler sur l’impact positif est l’un des deux piliers prioritaires de notre plan Ambition 2035. C’est un chantier de long terme qui nous amène à réfléchir sur nos agences, nos offres produits et nos missions. »
L'IA occupe une place importante dans nos projets. Nous allons développer des outils pour la génération automatique de devis, l'amélioration de l'expérience client et l'optimisation logistique.
Nous avons lancé un projet d'IA générative pour réduire le temps de réalisation des devis, les enrichir avec des solutions complémentaires, et rendre le traitement des demandes plus fluide. L'objectif est de permettre à nos collaborateurs de consacrer plus de temps à la relation client.
Nous utilisons aussi l'IA pour améliorer le service client, notamment via des chatbots, des outils de classification automatique des demandes et des systèmes d'IA vocale qui prolongent les heures d'ouverture. L'IA nous permet aussi de mieux cibler nos campagnes marketing grâce à une meilleure connaissance client.
Notre philosophie est claire : l'IA doit être un levier d'efficacité, pas un outil de suppression d'emplois. Nous voulons réinvestir le temps gagné pour renforcer la proximité commerciale, pas pour réduire les effectifs.
Enfin, nous travaillons également sur des plateformes de données clients (CDP) pour offrir une personnalisation encore plus fine de la relation commerciale, en anticipant les besoins de nos clients.
« L’agence reste un lieu de vie de nos clients. Le client continue à aller y acheter ses produits. La part des livraisons restent stables. La relation commerciale reste prédominante dans nos métiers. Nous allons continuer à y investir et grâce à l’IA, nous allons “augmenter” nos agences et “augmenter” nos collaborateurs sur la partie conseil. »
On m'a souvent dit que j'étais arrivé au pire moment, en pleine crise. Mais pour moi, c'était une opportunité. Je suis arrivé pile au moment où Ambition 2025 arrive à son terme, et il s’agit d’écrire collectivement la nouvelle feuille de route Ambition 2035.
Mon style repose sur l'énergie, la vision, la solidarité collective, la transparence et l'authenticité. Je suis ambitieux et passionné par la relation humaine et la proximité client.
Nous mettons toujours le client au cœur de notre action, en misant sur la relation de confiance et la solidarité dans les moments difficiles.
SGDB EN BREF
- Plus de 2 000 points de vente
- Une vingtaine d’enseignes : dont Point.P, Cedeo, Asturienne, PUM, Sfic, La Plateforme du Bâtiment, Dispano, Clim+ et CDL Elec.
- Effectif : 22 000 salariés environ
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