Leroy Merlin invente la notion de “capital faire”... et compte bien la développer

, mis à jour le 27/06/2025 à 15h29
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Atelier de formation "Capital Faire" dans la GSB Leroy Merlin de Villeneuve-d'Ascq (Nord).

L’enseigne nordiste a co-organisé à Lille la Maker Faire : une « fête de la créativité, de l’innovation, du DIY et du bricolage » peut-être moins anodine qu’il n’y paraît…En effet, elle est aussi un outil dans l’arsenal de Leroy Merlin pour lever les freins au bricolage. Mais aussi apporter du savoir-faire, donner envie…et confiance. Bref, donner du “capital faire” aux clients dans un esprit de réparabilité et de durabilité des produits.

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La Maker Faire Lille 2025 s’est tenue à EuraTechnologies, du 13 au 15 juin avec la présence de Dale Dougherty – le fondateur de Maker Faire en 2006 à San Francisco. L’évènement met en avant le bricolage, la réparation et l’inventivité.

« Le rôle de Leroy Merlin n’est pas seulement de vendre des produits. C’est aussi montrer que l’on peut réparer, commente Dimitri Lecocq, DG adjoint de l’enseigne d’Adeo. À l’image des Repair Cafés qui se développent, nous organisons 350 évènements chaque année dans nos magasins. »

Pour cette édition 2025, le premier jour est spécialement dédié aux écoliers. L’idée ? « Faire venir les écoles repose sur le fait que la transmission de ce savoir-là passe aussi par les enfants », explique le manager. La Maker Faire est le terrain d’une dimension différente que nous donnons à l’entreprise. Pas seulement à Lille ou Paris, elle a aussi lieu dans 100 magasins en France. »

« Le rôle de Leroy Merlin n’est pas seulement de vendre des produits. C’est aussi montrer que l’on peut réparer. À l’image des Repair Cafés qui se développent, nous organisons 350 évènements tous les ans dans nos magasins. »
Dimitri Lecocq, DG adjoint de Leroy Merlin

Et le DG adjoint d’argumenter : « Comme nous ne sommes pas une entreprise descendante, il faut convaincre 130 ou 140 directeurs. Nous nous servons des “early adopters” [les consommateurs en état de veille d’innovations : Ndlr] pour montrer que c’est puissant en magasin ».

L’enseigne apporte son soutien : « Nous leur fournissons une carte interactive des makers et venons valider sur les dimensions “proches de l’habitat”, indique Maïté Boussemart, responsable communication. Et nous leur fournissons un kit. En 2025, l’accent est mis sur les ateliers. En parallèle, des cours de bricolage gratuits ont lieu dans les magasins ».

L’enjeu de la transmission du savoir-faire

« Cette année, 80 % des magasins participent. L’an prochain, ce sera 100 %, escompte Dimitri Lecocq. La vague est lancée ! On demande au directeur de magasin d’être ancré dans son écosystème local. On utilise ce lien aussi pour Maker Faire qui est organisé avec des partenaires. Quand vous achetez un produit, vous trouvez le même partout – à Châteauroux comme à Brive, par exemple. »

Avant de tempérer : « Mais lorsque vous entrez dans la notion de services, alors c’est différent. La notion d’économie circulaire nous intéresse beaucoup. Il faut s’accrocher à la source pour générer de la circularité. Il nous faut toujours réfléchir : comment nos magasins trouvent la source et comment on répare. Nous investissons dans le SAV et dans la logistique pour répondre aux attentes du client. Notre sujet est l’habitat. Essayer d’orienter vers la maison et la vie dans la maison. La transmission aujourd’hui s’effectue différemment de l’époque où l’enfant regardait “Papa qui bricole” ! ».

Booster le “capital-faire”

Cette transmission est un enjeu capital pour Leroy Merlin que ses études internes ont mis en exergue. En effet, les focus groupes menés dans le cadre de Leroy Merlin Source mettent en avant trois moteurs incitant les Français à bricoler : l’économie frugale (réparer…), l’écologie (faire durer) et l’expression de soi (se sentir bien chez soi).

Mais ils pointent aussi des freins au bricolage : le sentiment de ne pas savoir faire (62 %) et la peur de rater (38 %). « C’est une forme d’auto-censure invisible, regrette Claire Letertre, responsable de l’activité recherche de Leroy Merlin (Source) ».

« Bricoler est une autre manière d’habiter et de consommer. C’est une critique du modèle de consommation rapide. »
Maïté Boussemart, responsable communication de Leroy Merlin

69 % des Français se déclarent bricoleurs (étude interne de Leroy Merlin Source)

 

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Leroy Merlin : atelier "Maker Faire" dans le magasin de Lesquin (Nord).

Selon une récente étude menée par Leroy Merlin Source (le réseau de recherche sur l’habitat de Leroy Merlin), 69 % des Français se déclarent bricoleurs. Une pratique qui, selon les profils, relève de la nécessité, de la passion, voire des deux. 

• 47 % des Français déclarent bricoler pour faire des économies. Réparer plutôt que jeter, réutiliser au lieu de remplacer ou encore retarder l’achat d’un produit neuf. Ces pratiques deviennent des stratégies concrètes pour préserver le pouvoir d’achat. 

• 41 % des personnes interrogées évoquent le plaisir personnel comme moteur principal de leur pratique. En 1989, ils n’étaient que 18 %. Ce chiffre marque une transformation : le bricolage n’est plus perçu uniquement comme une tâche utilitaire, mais comme un espace de créativité, de détente ou encore de développement personnel.

• 37 % citent des raisons écologiques et mettent en avant leur volonté de prolonger la durée de vie des objets, de recycler ou de détourner des matériaux de leur usage premier (réemploi).

• 55 % des pratiquants à l’étude évoquent la satisfaction personnelle qu’apporte le fait de faire soi-même. Ce lien intime avec le “faire” contribue à renforcer l’estime de soi en donnant à chacun la possibilité de concrétiser ses idées, d’exprimer sa créativité. Et de reprendre… le contrôle sur son cadre de vie.

Selon elle,« le bricolage ne s’improvise pas toujours : il dépend aussi du contexte dans lequel chacun évolue. Il manque parfois de “capital faire”. L’envie de bricoler est bien là. Le bricoleur peut s’appuyer sur internet avec les tutos. Reste que cela ne remplace pas le geste vu ». D’où l’importance des lieux de partage tels que les FabLab, Repair Cafés et autres ateliers collaboratifs.

« Dans les années 1980, cet apprentissage était transmis à l’école. Aujourd’hui, il renaît dans des lieux collectifs. Le bricolage est une autre manière d’habiter et de consommer. C’est une critique du modèle de consommation rapide, une expression de soi et un savoir-faire à transmettre, résume la responsable recherche. Le rôle de Leroy Merlin. C’est d’être aussi passeur de gestes, simplificateur et accélérateur de confiance. »

« La notion d’économie circulaire nous intéresse beaucoup. Nous investissons dans le SAV et dans la logistique pour répondre aux attentes du client. »
Dimitri Lecocq, DG adjoint de Leroy Merlin

Ticket moyen supérieur de 16 %

« Dans notre enseigne, nous avons souhaité réaffirmer notre ambition avec un DIY qui nourrit la promesse de marque : “Améliorer l’habitat », précise Maïté Boussemart. Les cours de bricolage existent depuis vingt ans. Constitués de 30 % de théorie et 70 % de pratique, ils sont réservables en ligne ou sur site, et réalisés dans une salle dédiée du magasin.

Ils accueillent quatre à huit participants et sont souvent animés par des formateurs qualifiés, parfois par des collaborateurs. Les cours sont répartis en trois types d’ateliers : le cœur de métier (pose de parquet par exemple), DIY (relooker un meuble, etc.) et l’atelier enfants.

« Notre priorité est le cœur de métier et nous souhaitons aussi faire monter en puissance l’atelier enfants qui cartonne ! D’ores et déjà, l’enseigne réfléchit à déployer des cours “Cœur de métier-enfants” », détaille Maïté Boussemart.

« En 2024, nous avons comptabilisé 68 000 participants à 23 000 cours donnés dans 123 magasins pour un chiffre d’affaires supérieur de 16 % chez les participants par rapport à un client qui ne suit pas de cours », poursuit-elle. À mi-mai 2025, nous enregistrons déjà pas moins de 30 000 participants pour 9 000 cours organisés. Les plus actifs sont les magasins de l’Ouest et de la région parisienne. Les magasins franchisés de La Réunion ou de Corse en dispensent aussi. »

« Nous avons testé un cours sur l’offre photovoltaïque qui a cartonné. Nous menons un test en septembre 2025 l’activité extra-scolaire auprès des enfants au magasin de Villeneuve-d’Ascq (Nord) pour le déployer en 2026 à l’échelle nationale. »
Maïté Boussemart, responsable communication de Leroy Merlin

Levier de (re)fréquentation

Sur le sujet de la transmission, les pistes sont nombreuses. Maïté Boussemart pointe entre autres une initiative qui a pris vie en 2015. Celle-ci consiste à aller dans les écoles pour organiser des cours de bricolage.

« Ce sont plutôt les directeurs de magasins qui prennent la main aujourd’hui comme au magasin de Lesquin (Nord) qui dispense des ateliers dans les établissements scolaires. Mais c’est une initiative que nous aimerions relancer. Nous devons aussi augmenter la notoriété des cours, d’autant que nous en avons toujours de très bons retours », confie-t-elle.

Et de résumer les ambitions du n°1 tricolore des GSB : retravailler l’offre des cours, les cibler et accompagner au maximum les magasins. « Nous avons testé un cours sur l’offre photovoltaïque qui a cartonné. Nous allons tester en septembre 2025 l’activité extrascolaire auprès des enfants au magasin de Villeneuve-d’Ascq (Nord) pour le déployer en 2026 à l’échelle nationale », souligne encore Maïté Boussemart.

Le distributeur propose également des ateliers du soir qui sont un moyen pour se retrouver « C’est intéressant d’organiser des cours de bricolage car un levier de re- fréquentation des clients dans nos points de vente », estime la responsable communication en guise de conclusion.

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