Image
pavé tok
Stéphane Vigliandi

[EXCLU] « Nous avons toutes les cartes en main pour adresser le marché de la rénovation énergétique »

Sibylle Daunis-Opfermann,
directrice générale de
La Plateforme du Bâtiment (SGDB France)
Image
Sibylle Daunis-Opfermann, DG de La Plateforme du Bâtiment.

À la tête de La Plateforme du Bâtiment depuis février 2024 après dix-huit ans passés chez PUM, Sibylle Daunis-Opfermann accorde son premier entretien à la presse professionnelle Bâtiment. Évolution du concept, rénovation énergétique, poids carbone de l’offre, RSE, logistique, digital… : pour la rédaction Zepros Négoce, elle dresse un premier point d’étape et déroule des éléments de sa feuille de route.

Partager sur
Coup de rétro’ dix mois après votre prise de fonction
Sibylle Daunis-Opfermann,

Il y a un socle commun fort entre les différentes enseignes de Saint-Gobain Distribution Bâtiment France (SGDB France). À La Plateforme du Bâtiment, j’y ai retrouvé un grand nombre de valeurs communes que nos équipes partagent avec les autres enseignes du groupe à travers sa démarche “Ambitions 2035”. Avec une vraie envie de faire grandir les collaborateurs en interne, de s’adapter et de se transformer face aux défis en cours et à venir sur nos marchés. Nous sommes dans un esprit de test & learn pour que le concept se réinvente au quotidien. En outre, la mission d’entreprise est primordiale : avoir une vision innovante et continuer à faire évoluer nos modèles tout en s’appuyant sur l’ADN puissant que nous apporte Saint-Gobain. Cela dit, le format de La Plateforme est assez différent de celui des autres enseignes de SGDB France, notamment PUM [dont elle a été directrice générale durant près de sept ans et demi : Ndlr]. Ce serait d’ailleurs une erreur de vouloir comparer ces deux concepts et reproduire le schéma Négoce de PUM à La Plateforme du Bâtiment. Au sein du groupe, La Plateforme fonctionne en mode start-up. Notre business model s’appuie sur des structures de 20 à 120 collaborateurs en moyenne par dépôt quand ils sont une dizaine par agences dans les autres enseignes de SGDB France. Nos plages horaires sont très larges comparées aux autres négoces : de 6h00 à 20h00 du lundi au vendredi, et de 6h30 à 18h00 le samedi. Durant les Jeux Olympiques de Paris 2024, nous avons même ouvert dès 5h00 en région parisienne. Les formats, eux aussi, sont différents avec des sites allant jusqu’à 1 500 m2 pour La Plateforme Compact et 3 000 m2 pour la version classique. Malgré ces différences, les équipes ont besoin de travailler dans une entreprise porteuse de sens. Depuis plusieurs années, PUM a pris position pour généraliser le stockage et le réemploi de l’eau pluviale : une ressource essentielle. À La Plateforme du Bâtiment, ce doit être la rénovation énergétique.

Structuration d’une offre dédiée à la rénovation énergétique…
Sibylle Daunis-Opfermann,

Jusqu’à présent, l’enseigne avait sans doute tendance à un peu moins communiquer sur ce dossier qui concerne pourtant tous les rénovateurs urbains : notre cœur de cible. Avant mon arrivée, Jean-Louis Bolard [le directeur général de 2014 à avril 2024  : Ndlr] et ses équipes ont engagé un vrai virage en 2023 en construisant une offre ad hoc. Nous ne parlons désormais plus de produits, mais de solutions en clarifiant l’offre dédiée à la rénovation énergétique et en la rendant plus lisible. C’est ce qui va transparaître de façon encore plus forte dans notre catalogue Mémento qui sortira en avril prochain, ainsi qu’à travers le parcours client dans nos 68 dépôts. Il s’agit de mieux informer et former les artisans pour bien les accompagner. Depuis fin 2023, nous avons déjà formé à l’obtention du RGE plus de 400 clients via des modules de deux jours. D’ici à la fin de l’année, il y en aura une centaine de plus. Nous les accompagnons aussi sur le volet administratif du RGE (prise en charge des formations, validation des chantiers de référence, aides d’État, etc.). À ce jour, un artisan sur deux a souscrit à cette offre de services que nous allons formaliser en la marketant.

« Aujourd’hui, notre feuille de route est claire : nous devons être en capacité de pouvoir répondre au marché d’avenir de la rénovation énergétique dès lors que notre offre est bien bordée. »

…et montée en compétence de la force de vente
Sibylle Daunis-Opfermann,

Notre enseigne a redoublé d’efforts en la matière pour former l’ensemble des managers de dépôt et les commerciaux. Il s’agit de leur permettre de savoir bien analyser et interpréter un DPE [diagnostic de performance énergétique : Ndlr]. En outre, plus de 70 collaborateurs ont été formés pour devenir des RAR [référents d’aide à la rénovation : Ndlr]. Parmi eux, il y a des conseillers techniques. Une centaine d’autres collaborateurs suivront aussi cette formation. En parallèle, nous sommes en train d’équiper nos 70 commerciaux de Cap Rénov+ ; cet outil permettant de déterminer le bouquet de travaux à réaliser et son impact sur la performance énergétique du bâtiment. Le but est de leur permettre d’acquérir les bons réflexes et le bon argumentaire (solutions et performances techniques, aides fiscales…) pour éclairer l’artisan et son client à bien choisir les équipements. Aujourd’hui, nos clients – TPE et PME – s’appuient très souvent sur un portefeuille clients réguliers et connus. Mais ils disposent d’un vrai capital confiance auprès d’eux . C’est sans doute ce qui fait défaut en matière de RGE et d’aides d’État. Quoi qu’il en soit, les artisans vont s’emparer du vaste chantier de rénovation énergétique dont une grande partie concerne les travaux qui ne sont pas aidés. C’est d’ailleurs ce qui me rend optimiste pour 2025 en termes d’activité !

Offre globale pour la rénovation énergétique ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

À cet égard, La Plateforme du Bâtiment bénéficie d’un incroyable terreau d’artisans qui se questionnent sur l’opportunité d’y aller ou pas. Aujourd’hui, notre feuille de route est claire : nous devons être en capacité de pouvoir répondre à ce marché d’avenir dès lors que notre offre est bien bordée. J’estime que nous sommes la seule enseigne à disposer de toute l’offre pour que l’artisan puisse réaliser une rénovation globale, et l’accompagner dans ce parcours. C’est un puissant atout qui nous permet dorénavant de revendiquer pouvoir aussi adresser ce marché. Nous avons toutes les cartes en main.

« Mon benchmark porte notamment sur les concepts BtoC, en GSA, chez les pure-players – que ce soit en Europe, aux États-Unis ou ailleurs. »

Des ambitions de cibler aussi le particulier ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

Nous leur parlons sans, toutefois, leur donner accès à nos dépôts. Les équipes de France Rénov ont déjà commencé à constituer un réseau de MAR [Mon Accompagnateur Rénov’ : Ndlr] en lien avec nos dépôts et les artisans à l’échelle locale. La Matériauthèque que nous avons ouverte en avril 2021 à Paris, dans le XIe arrondissement, est aussi un lieu pour les MAR. Ce concept est extrêmement pertinent puisqu’il permet de simplifier le parcours du professionnel et de le décharger sur les aspects liés à la prise en charge du particulier. Nous y avons aussi intégré le concept de Soluthèque où sont abordés tous les enjeux de la rénovation énergétique et les solutions techniques. C’est un lieu où nous formons aussi les équipes de nos dépôts. Une seconde Matériauthèque pourrait ouvrir en région parisienne.

Vos projets en termes de maillage territorial ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

Le cap fixé par Jean-Louis Bolard reste inchangé. À savoir : disposer d’environ 80 dépôts à moyen terme sur toute la France. La force de notre modèle est d’être en hyper-proximité des chantiers de rénovation dans un rayon de 15 minutes. Nos deux récentes ouvertures ont été menées à Bordeaux-Lac où l’enseigne dispose maintenant de trois points de vente dans l’agglomération bordelaise, et le 68e à Aix-en-Provence qui est la 5e dépôt dans la zone du Grand Marseille. Nous avons également finalisé la rénovation de trois sites : Nanterre et Neuilly-sur-Seine dans l’Ouest parisien, et à Toulouse. Avec deux lignes de force : élargir l’assortiment et l’offre de services dont la mise en place de l’enlèvement Express, mais aussi optimiser le parcours client. À Neuilly, il s’agit d’un test. Ce dépôt très axé Électricité à l’origine a été repositionné en format Comptoir [agence intra-muros, 600 m2 de libre-service et 5 000 références : Ndlr].

Un ancrage phygital fort ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

J’effectue ma veille ailleurs que dans le négoce Bâtiment. Mon benchmark porte notamment sur les concepts BtoC, en GSA, chez les pure-players – que ce soit en Europe, aux États-Unis ou ailleurs. Ce sont des formats que j’examine de près pour me forger une idée sur ce que nous pouvons y puiser et adapter à notre modèle. Depuis la crise sanitaire de 2020, il y a une réelle dynamique à propos de l’e-commerce, du drive. Ce mouvement s’est encore intensifié dans notre réseau en 2024. La part des commandes en ligne est de l’ordre de 10 à 15 % de notre chiffre d’affaires aujourd’hui. Nous sommes animés par “l’obsession du parcours client” dans son intégralité : l’enlèvement Express est une bonne illustration, mais le dispositif ne se déploiera que sur les gros dépôts. Le but est d’offrir une expérience client différenciante. Depuis juin dernier, l’enseigne propose également la livraison par triporteurs et camionnettes électriques pour décarboner la “logistique du dernier km”.

« Malgré les récentes annonces décevantes à propos de MaPrimeRénov’, le marché va finir par se relever. »

PUM : un exemple pour La Plateforme en matière de RSE ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

Chez PUM, j’ai déployé dès la fin 2020 avec mes équipes le programme PURE (“Pour un réseau engagé”). J’aurai à cœur de continuer développer les actions déjà engagées en termes de RSE à La Plateforme. Sur les aspects environnementaux, cela passe entre autres par la rénovation énergétique de notre parc immobilier, la collecte des déchets de chantier dans le cadre de la REP PMCB – à ce jour, 37 dépôts sont dotés de déchèteries dont le nombre de flux augmentera en 2025. Nous devons œuvrer à renforcer la prise de conscience écologique auprès des artisans, faire évoluer notre offre à travers le réemploi, être un catalyseur avec les fabricants fournisseurs sur ce dossier, mais aussi des start-up. Sur le volet social, au-delà de la parité et de l’inclusion, nous créons par exemple de véritables lieux de vie partagés pour les collaborateurs dans les dépôts.

La Plateforme, ascenseur social ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

Nous avons lancé début octobre la 3e promotion de notre dispositif “Les Passerelles”. Durant quatre mois, des collaborateurs expérimentent sur la base du volontariat une autre fonction au sein des dépôts. C’est en somme un mercato pour qu’ils puissent avoir des opportunités d’évolution de carrière dans l’enseigne. Par exemple, des hôtesses de caisse souhaitant évoluer vers un poste de vendeur conseil, mais aussi des conseillers Enlèvement. C’est aussi un moyen de fidéliser les équipes dans un contexte de métiers toujours en grande tension.

Votre regard sur la conjoncture dans le Bâtiment ?
Sibylle Daunis-Opfermann,

Bien que notre enseigne soit moins impactée car essentiellement positionnée sur le marché de la rénovation, l’activité reste mise à mal. Malgré les récentes annonces décevantes à propos de MaPrimeRénov’, le marché va finir par se relever. Il y a aussi deux segments encore assez balbutiants, mais porteurs : la surélévation et l’extension des bâtiments. Les solutions techniques se développent. À nous de bien savoir les appréhender pour les proposer à nos clients.
Propos recueillis par Marie-Laure Barriera et Stéphane Vigliandi

Stéphane Vigliandi
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire