IA, REP et MaPrimeRénov’ au menu des 14es “Rendez-vous du Négoce” de la FDMC

, mis à jour le 17/06/2025 à 20h11
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Les 14es "Rendez-vous du Négoce" organisés par la FDMC (Fédération des distributeurs en matériaux de construction) le 11 juin 2025 à Paris.

Entre exercice prospectif sur l’intelligence artificielle (IA) et point d’étape relatif à l’actualité réglementaire (REP PMCB, MaPrimeRénov’, CEE), la 14e édition des “Rendez-vous du Négoce” a une fois encore tenu ses promesses. Morceaux choisis.

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Dans un climat d’affaires sous tension et chahuté dans la filière du Bâtiment, la FDMC a choisi de regarder droit devant lors la 14e édition de ses “Rendez-vous du Négoce” qui s’est tenue le 11 juin à la Maison de l’Amérique Latine à Paris. Et d’aider à se projeter les quelque 200 invités représentant le négoce et l’amont industriel.

Fil rouge de cette session 2025 ? “Bâtir l’avenir : ce qui s’annonce”. Avec, à la clé, trois tables rondes destinées à décrypter les clés de la compétitivité des négoces – dont les marges et les encours clients sont parfois mises à mal – sous le prisme d’un stop and go réglementaire, d’une accélération de la digitalisation des pratiques et des attentes clients.

Trois tables rondes et 14 intervenants

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Les 14es "Rendez-vous du Négoce" organisés par la FDMC (Fédération des distributeurs en matériaux de construction) le 11 juin 2025 à Paris - Table Ronde sur l'IA.
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Les 14es "Rendez-vous du Négoce" organisés par la FDMC (Fédération des distributeurs en matériaux de construction) le 11 juin 2025 à Paris - Table ronde sur la REP PMCB.
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Les 14es "Rendez-vous du Négoce" organisés par la FDMC (Fédération des distributeurs en matériaux de construction) le 11 juin 2025 à Paris - Table ronde sur les aides publiques à la rénovation énergétique.

Du chatbot à l’IA agentique

Première séquence autour de l’IA. D’entrée de jeu, Marine Casiez (DG de GrowSale, un collectif d’experts en marketing digital et branding) a rappelé que « de nouveaux métiers vont se greffer autour de l’IA. Son intégration dans les CRM s’opère, bien sûr, selon le degré de maturité des entreprises. Avec une principale visée : continuer d’optimiser l’expérience client ».

Mais, « il y a un prérequis », selon Pascal Andriès. DG d’Orisha Construction (une plateforme logicielle dédiée au BTP et aux négoces née de la fusion entre DL Négoce et Onaya), il estime que « la cloudification* est “le” catalyseur pour s’appuyer sur l’IA afin d’exploiter de la data qui n’a plus forcément besoin d’être hyper structurée – l’IA sait très bien le faire. Alors que la pression s’accentue sur les négoces, cet outil permet de créer des alertes lorsque les niveau de marges, d’encours clients, de stocks, etc. se réduisent ».

* Définition de la Cnil : « Le cloud computing (en français : “informatique dans les nuages”) fait référence à l’utilisation de la mémoire et des capacités de calcul des ordinateurs et serveurs répartis dans le monde entier et liés par un réseau. Les applications et données ne se trouvent plus sur un ordinateur déterminé, mais dans un nuage (cloud) composé de nombreux serveurs distants interconnectés ».

« Les solutions d’IA permettent de faciliter la sélection de produits aux clients. Mais attention à une possible perte de connaissances techniques chez les négoces. »
Grégory Ragot, DG de Fab.Dis

De son côté, Alexandre Louis (DG de la start-up Graffiti AI) souligne que la technologie permet de « mettre un vendeur dans la poche de chaque client ». Et de citer l’exemple d’un de ses budgets en BtoC : « Au Monoprix de Paris-Montparnasse, le consommateur peut en quelques clics sélectionner le vin idéal parmi le catalogue de l’enseigne pour accompagner son dîner ». Un modèle transposable chez les négoces ? A priori « Oui ! », selon cet expert – d’autant que les DSI engrangent beaucoup de données depuis une dizaine d’années.

En écho, Grégory Ragot (DG de Fab.Dis) met en avant « les bénéfices opérationnels de l’IA dans une logique de time-to-market lorsque, par exemple, les nouveaux tarifs fournisseurs sont négociés en début d’année. C’est un vecteur de productivité tant pour le distributeur que l’industriel ». La plateforme Fab.Dis doit d’ailleurs implémenter courant 2026 de nouveaux services liés à l’IA. Preuve que le sujet est pris à bras le corps par la majorité de la chaîne de valeur.

S’il s’agit de « rendre l’outil accessible au plus grand nombre », Grégory Ragot évoque déjà « une technologie de rupture ». « Au-delà de l’IA conversationnelle (les chatbots), les entreprises vont devoir intégrer dans leur stratégie digitale l’IA agentique qui permet de réaliser des flux de travail intelligents et autonomes rationalisant les opérations et améliorant la productivité avec un niveau de supervision limité ».

Parmi les applications possibles : déterminer le niveau de chiffre d’affaires réalisé avec un client sur une période prédéfinie, comment éviter les ruptures de stock, faire de l’avant-vente.

REP PMCB : vers des certificats de reprise des déchets ?

Deuxième table ronde : celle consacrée à la REP Bâtiment en place depuis plus de deux ans. Avec une question centrale : “L’heure d’un vrai tournant pour la gestion des déchets ?” au moment où le gouvernement souhaite la refondation de cette filière.

Il y a d’abord un constat positif. Pour Hervé de Maistre (président de Valobat), « les distributeurs ont fait le job ! Jamais dans l’histoire des REP, le maillage des points de collecte a été aussi remarquable et s’est développé – peut-être – trop vite par rapport aux prévisions des pouvoirs publics ». Reste toutefois « un dilemme » selon lui : « Depuis l’automne 2024, 60 % des points de collecte tirent l’activité de reprise. Comment optimiser et améliorer l’efficacité du dispositif ? ».

Sa consœur d’Écomaison, Dominique Mignon, constate qu’« en deux ans, plus de 2 300 points de vente (négoces et GSB) se sont équipés de bennes. C’est beaucoup plus que ce qui s’est passé pour la REP Ameublement qui a mis sept ans pour atteindre ce chiffre ! ».

« Aujourd’hui, environ 20 % des revendeurs dont les places de marché échappent à l’obligation de collecte des déchets. »
Dominique Mignon, présidente d’Écomaison

À la tête de la commission économique de la FDMC, Patrick Bourdon (SGDB France) appelle, lui, à « une REP soutenable ». Et de souligner que « notre profession n’est pas surprise quant à la refondation du dispositif voulu par les pouvoirs publics. Il y a des éléments sur lesquels la FDMC avait déjà alerté il y a quatre ans comme relever la surface des agences éligibles de 4 000 m2 à 10 000 m2 ». Autre requête de la part du négoce : rendre l’écocontribution, enfin, visible.

Dominique Mignon a soulevé aussi un point de friction : le coût économique de la REP. « D’ici à 2030, la filière pourrait coûter jusqu’à 1 Md€ pour collecter et recycler les matériaux inertes et le bois. Avec une forte répercussion sur l’écocontribution qui pourrait augmenter jusqu’à 20 % le prix des produits », évalue-t-elle. Une charge jugée « insoutenable » pour la filière.

« La gratuité de la reprise est un point bloquant pour redonner de la valeur aux déchets, tandis que le maître d’ouvrage reste le grand oublié de la REP PMCB. »
Cynthia Caroff, présidente de la commission RSE et développement durable de la FDMC

Dans le même esprit, la présidente de la commission RSE et développement durable de la FDMC, Cynthia Caroff (SIG France) juge que « la réglementation s’est trop focalisée sur les obligations de moyens. Beaucoup d’initiatives intéressantes sont menées sur le terrain. Mais, il faut libérer les idées, réfléchir à un modèle où la ressource est valorisée ».

Parmi les pistes évoquées ? « Pourquoi ne pas s’inspirer du systèmes des CEE en créant des certificats de recyclabilité des déchets : un levier qui permettrait valoriser ces initiatives, les produits recyclés ou de réemploi », interroge-t-elle.

Réemploi : une solution qui, bien sûr, s’est invitée à plusieurs reprises lors de cette table ronde. Hervé de Maistre appelle d’ailleurs à « développer le réemploi, explorer les opportunités, mettre en place des éco-modulations et des contrats fabricants pour que le recours au réemploi s’accentue sur les chantiers ».

Avec, cependant, un bémol. Cynthia Caroff rappelle « les possibles freins au réemploi, à la seconde main pour des questions d’assurance, d’homologation des produits et de mise en œuvre notamment ».

Quoi qu’il en soit, Arnaud Humbert-Droz (président de Valdélia) a tenu à souligner que « la REP n’est pas un… gros mot ! Elle peut être un atout pour le négoce pour capter des artisans dans les agences, démultiplier, le cas échéant, les ventes, voire proposer aux clients des services complémentaires ».

« Ne faudrait-il pas réécrire la REP PMCB pour qu’elle soit opérationnelle ? En 2021, le gouvernement avait fixé un objectif de 43 millions de t/an de déchets collectés. Le seuil se situe à 21-22 millions de t/an actuellement. »
Patrick Bourdon, président de la commission économique de la FDMC

Rénovation énergétique et aides d'État en suspens, mais...

Dernière séquence sur les “Aides publiques à l’aménagement : s’engager pour maintenir le cap”. Un dossier brûlant avec le gel du guichet MaPrimeRénov’ (MPR) jusqu’au 15 septembre 2025. Depuis le 11 juin, les acteurs du Bâtiment ont néanmoins obtenu quelques avancées. La ministre du Logement, Valérie Létard, a confirmé ce 17 juin que les parcours MPR monogestes et copropriétés sont épargnés de la suspension.

Florence Liévyn (présidente de la GPCEE, le Groupement des professionnels des CEE qui regroupe 15 entreprises délégataires) juge néanmoins que « nous sommes dans un période de flou : la 5e période des CEE sera achevée fin 2025, mais aucun n’arbitrage n’a encore été fait pour la 6e période [2026-2030 : Ndlr] ».

Si elle voit dans la suspension de MPR « un début de débudgétisation » du dispositif, elle évoque aussi « un transfert de MPR vers les CEE » via des tiers-financeurs qui se rémunéreront sur le coût des travaux.

« La suspension de MaPrimeRénov’ [pour les travaux d’ampleur] est peut-être l’occasion de sortir en partie du système des aides d’État. »
Florence Liévyn, présidente de la GPCEE

Un sentiment partagé par Alexandre Yvon (président de SoluGryn). « Les aides d’État sont trop volatiles et… dangereuses. Actuellement, seuls 38 % des CEE disponibles sur le marché ont été utilisés, alors qu’ils sont accessibles à tous : de l’artisan aux gros industriels », note-t-il. Il n’hésite pas à faire le parallèle avec MaPrimeAdapt’ : « Seuls 40 000 chantiers par an sont engagés alors que 3 millions de logements sont éligibles ».

L’occasion pour Mathieu Alapetite (DG de l’association France Silver Éco) de préciser qu’« il faut faire converger les transitions énergétique et démographique dans le cadre des travaux – d’autant que les baby-boomers [nés entre 1943 et 1960 : Ndlr] vont passer de quatre à six millions d’ici à dix ans ».

Avec un argument de poids : « Entre huit et neuf seniors sur dix veulent vieillir chez eux. Le potentiel d’adaptation des logements est énorme ». Un appel du pied à l’attention des négoces pour « mieux appréhender ce marché et s'en saisir de ce marché ».

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