La FDMC appelle à « retrouver un peu de lumière et un bol d’air »
Conjoncture, rénovation énergétique, poids de la réglementation, fiscalité... À l’occasion du traditionnel déjeuner-rencontre Négoce-Industrie ce 20 novembre à Paris, Marie Arnout, la présidente de la FDMC, a rappelé les craintes et incertitudes qui pèsent sur la filière du BTP. Mais tout n’est pas sombre. La fédération remporte une « victoire » sur le dossier de la REP PMCB, tandis que la distribution ne disposera plus que d’une seule convention collective Matériaux & Bois.
Des « chiffres calamiteux » à propos des mises en chantier de logements, « la chute des permis de construire », les défaillances d’entreprises à un « taux historiquement haut », « la baisse de la productivité », la crainte du « spectre de la récession »… À un an d’intervalle, c’est un discours fait d’inquiétudes qu’a tenu Marie Arnout lors du déjeuner annuel de la FDMC. Sans intention, toutefois, de « broyer du noir plus que de raison ».
Dans un climat politique et économique sous haute tension, elle a d’ailleurs emprunté au vocabulaire de la météo pour exprimer le ressenti de la profession devant 200 invités. « Un brouillard épais entoure nos entreprises depuis plusieurs semaines », a-t-elle constaté. Avec un mot qui peut « résumer à lui seul ce smog inédit : celui d’incertitude ».
Si l’an dernier, Marie Arnout appelait à « imaginer un nouveau monde » sur fond de crise dans le neuf, elle s’est fait cette année la porte-parole pour que la filière « retrouve un peu de lumière et un bol d’air ». L’issue passe par « la volonté gouvernementale de procéder par la simplification » que la FDMC dit prendre « très en considération ».
« Nous ne pouvons que joindre notre voix à celle des nombreuses organisations professionnelles de la construction qui s’inquiètent à l’unisson de ce trou d’air et des pertes d’emplois qui y sont liées. »
Des avancées malgré tout…
Certes, le tableau est sombre. Mais il y a malgré tout quelques lueurs d’espoir. Par exemple, le souhait du ministère du Logement de ne pas modifier les dispositions liées à la sous-traitance via une entreprise RGE. Pour Marie Arnout, « la qualification RGE est la clef d’entrée pour accéder aux aides de l’État ».
Reste encore à savoir si sa récente simplification suffira à relancer ce label. Le nombre d’entreprises qualifiées est tombé entre 2022 et 2023 de 65 000 à moins de 61 000 alors que le Secrétariat général à la planification écologique a fixé une trajectoire à… 113 000 entreprises RGE en 2026.
La fédération estime d’ailleurs que le souhait du gouvernement de « rendre le RGE plus accessible [va] dans le bon sens ». Sur ce front-là, « la distribution s’est mise en ordre de bataille pour être, je n’ose pas dire accompagnateur, mais bien compagnon de route de ses clients ». Presque trois ans après son lancement, le programme Oscar – prolongé jusqu’à fin 2025 – aligne aujourd’hui plus de 1 500 RAR formés dans les négoces.
« Nous prenons acte du volontarisme exprimé par le gouvernement et serons signataires de tout pacte ou charte allant dans le sens d’une politique pro-active en faveur de la construction. »
…mais qui restent insuffisantes
Autre « satisfaction », mais... en demi-teinte : malgré un budget MaPrimeRénov’ en net repli, la FDMC se félicite que l’accès aux aides d’État soit reconduit via le dispositif des monogestes ; tout en rappelant que « le but à terme est bien de procéder par la rénovation globale ».
Si Marie Arnout voit plutôt d’un bon œil « la simplification du DPE », elle alerte le gouvernement sur un éventuel assouplissement du calendrier, lié au DPE, portant sur l’interdiction de louer des passoires thermiques. Jusqu’à présent, l’échéancier est fixé à 2025 pour les logements classés G, 2028 pour ceux classés F et 2034 pour ceux étiquetés E.
À propos de la REP PMCB, elle a salué « des assouplissements en passe d’être actés » à la veille de la publication d’un décret autorisant les négoces à déroger à la règle de reprise des déchets en agence ou à proximité immédiate. Ce 21 novembre, la FMDC s’est ainsi félicitée de « l’aboutissement » d’un long bras de fer avec les pouvoirs publics.
CÔTÉ CONJONCTURE
La FDMC a constaté une baisse d’activité « sensible dès l’été ». Malgré « un petit mieux » début novembre, l’atterrissage risque d’être très difficile. Au moins -10 % en valeur en 2024 « dans le meilleur des cas », voire « sans doute moins pour les négoces surtout positionnés sur le neuf ».
Parmi les autres satisfecits ? « Le PTZ généralisé dans le neuf [sur tout le territoire] ou la dotation exonérée d’impôt pour le logement constituent des mesures qui montreront leur efficacité », admet Marie Arnout. Avant de souligner que ces mesures « risquent d’être bien insuffisantes pour tirer vers le haut l’activité de la rénovation énergétique » tout en prenant soin d’exhorter « le gouvernement de ne pas céder aux sirènes qui chantent le ralentissement du calendrier ».
Le 1er octobre dernier, lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, le Premier ministre Michel Barnier avait tenté de rassurer la filière du Bâtiment. Il avait formulé une série d’annonces visant à relancer tant la construction (assouplir le ZAN, faciliter l’accession à la propriété dans le parc social…) que la rénovation énergétique. Le PLF 2025 écornera-t-il ces promesses ? Au risque de plonger un peu plus les acteurs du BTP dans... un épais brouillard.
Parmi les autres dossiers d’actualité
• CÔTÉ RÉGLEMENTATION Inflation normative, mille-feuille administratif… : la présidente de la FDMC a fait part de l’« incompréhension » des adhérents (4 260 sociétés pour 21 Md€ de chiffre d’affaires) face « aux exigences de réglementations chronophages et souvent sans fondement ».
• CÔTÉ RSE En vigueur depuis janvier 2024 pour les sociétés de plus de 500 salariés, la CSRD (directive sur la publication d’informations en matière de durabilité) concernera les plus de 250 employés qui devront établir un reporting extra-financier tous les ans. Dès 2026, ce sera au tour des PME cotées en bourse.
Pour Marie Arnout, cette directive « sera complexe à appliquer pour une PME, voire une TPE ». À la FDMC, le groupe de travail RSE a engagé la réflexion pour embarquer ses adhérents.
En France, environ 5 000 entreprises privées et publiques (tous secteurs confondus) sont aujourd’hui soumises à publication de leurs données Climat. Demain, la CSRD devrait concerner « au moins 8 000 sociétés » selon le think-tank Carbone 4.
• CÔTÉ SOCIAL La simplification conventionnelle du négoce de matériaux de construction est actée. Dès le 1er janvier 2025, la convention collective du négoce de bois disparaît et fusionne avec celle du négoce de matériaux jugée « mieux-disante ».
• CÔTÉ RH & FORMATION D’une part, la convention de coopération avec les ministères de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et l’OPCO Constructys est reconduite pour cinq ans. Elle permet à la FDMC de s’appuyer sur des ambassadeurs du négoce pour valoriser l’image des métiers auprès des jeunes.
Ensuite, via Constructys, la fédération dispose actuellement de deux EDEC (Engagement et développement de l’emploi et des compétences) en Île-de-France et PACA. Avec trois missions majeures pour accompagner les négoces : adapter les formations aux enjeux de la transition écologique et, en particulier, de la rénovation énergétique ; améliorer l’attractivité des métiers du secteur auprès des jeunes et séduire de nouveaux profils ; stimuler les entreprises dans leurs transformations numérique et écologique.
• CÔTÉ GÉNÉROSITÉ Dans un contexte où les troubles musculosquelettiques (TMS) représentent la première cause de maladies professionnelles dans le secteur du Bâtiment, la FDMC s’engage dans la première édition du Téléthon du Bâtiment.
Mission ? Soutenir la recherche en myologie. Le 28 novembre, les acteurs du BTP (industriels, constructeurs, distributeurs et écoles de formation) ont rendez-vous au pied de la Tour Eiffel pour ce qui devrait être « une mobilisation inédite ». Selon Marie Arnout, il s’agit là d’« un bel élan de solidarité de toute une filière ».