« La financière Nebofi et New Gen : deux leviers pour pérenniser notre groupement »
La 7e édition du salon Nebo’Dating a permis au groupement de revenir sur les temps forts de ses trente ans d’histoire. L’occasion aussi d’aborder les principaux axes de sa feuille de route “Vision 2030”. Création d’une financière, charte des droits et devoirs, changement de génération – en cours ou à venir – à la tête des 26 entreprises associées, RSE, transformation digitale et IA… : la direction de Nebopan (adhérent CMEM) détaille pour la rédaction de Zepros Négoce les priorités stratégiques.
Ce Nebo’Dating 2025 a eu une saveur particulière puisque votre groupement y a célébré ses 30 ans. Quels messages avez-vous souhaité faire passer auprès de vos 26 membres ?
Christophe Genson : Ils sont de plusieurs natures. Tout d’abord, je tiens à souligner tout le travail accompli par mes prédécesseurs : d’Élie Polombo (notre premier président de 1994 à 1997) jusqu’à Hervé Auger dont le mandat s’est achevé fin 2023. Leur vision, leur détermination et l’engagement collectif menés au cours de ces trente années sont la preuve sans faille de la réussite de Nebopan et de son projet : fédérer des négoces indépendants en bois, panneaux et dérivés sur un marché dont les cycles économiques sont de plus en plus courts. Aujourd’hui, nous sommes une belle et grande famille dont les valeurs transmises par nos pères fondateurs perdurent ! Lorsque je regarde tout le chemin parcouru, je constate que le groupement n’a jamais dévié de sa route depuis juillet 1994 [la date de création officielle de Nebopan : Ndlr] tout en s’adaptant aux évolutions de nos marchés. Nous continuons et continuerons à défendre notre indépendance et le sens du collectif et du collaboratif.
Laëtitia Aussenac : Nebopan n’a jamais cessé d’évoluer et de grandir depuis trente ans en s’appuyant sur une vision commune et la manière d’aborder les marchés et métiers que nous adressons. Cet esprit collectif a permis à chacun des associés du groupement de s’adapter, voire d’anticiper les mutations de la filière bois – qu’il s’agisse notamment de l’évolution des modes constructifs et de la réglementation, des nouveaux comportements d’achat liés à la transformation digitale de la distribution (e-commerce, applis mobiles, click & collect…), mais aussi de la transformation environnementale. Ce contexte général ne nous a pas empêché de continuer à nous positionner en tant que spécialistes avec de réels expertise et savoir-faire.
« Aujourd’hui, nous sommes une belle et grande famille dont les valeurs transmises par nos pères fondateurs restent intactes ! »
Christophe Genson, président de Nebopan
Ce 30e anniversaire donne lieu à une nouvelle signature pour le groupement : “Le bois au cœur de notre avenir”. Quelles en sont les principales raisons ?
Christophe Chausson : Il n’est pas question de faire fi du passé. Bien au contraire ! Nous sommes et resterons toujours attachés à notre statut d’indépendant et à notre positionnement de spécialistes. Mais la nouvelle baseline marque un changement de perception – par la société en général, la prescription, les pouvoirs publics… – vis-à-vis du bois et ses avantages environnementaux. À la condition d’être gérée durablement, les forêts et le bois sont de véritables puits de carbone tout au long de leur cycle de vie. Qu’il s’agisse de logements ou d’immeubles de grande hauteur, ce matériau noble a toute sa place dans la construction neuve et en rénovation face à l’urgence climatique. C’est le sens profond de cette nouvelle signature.
L. A. : Ce matériau est renouvelable, recyclable, à faible empreinte environnementale et stockeur de CO2. C’est unique dans la filière de la construction. Malgré son immense potentiel, il reste encore sous-exploité. Néanmoins, la France a pris les devants en mettant en œuvre la RE 2020 qui impose des seuils stricts d’émissions de gaz à effet de serre. Par ailleurs, la réglementation européenne vise à généraliser l’utilisation de matériaux bas carbone tels que le bois [il s’agit entre autres de la directive UE sur la performance énergétique des bâtiments – l’EPBD : Ndlr].
C. C. : En mettant par ailleurs la notion d’avenir, notre nouvelle signature souhaite évoquer de façon explicite le changement de génération en cours dans nos entreprises. À cet égard, le Nebo’Dating 2025 a permis de réunir trois générations de dirigeants. Ce salon avait donc une saveur un peu particulière. Il a permis de regarder le passé du groupement pour encore mieux préparer notre avenir.
« Pour anticiper le changement de génération au sein des sociétés membres de Nebopan, nous venons de lancer “New Gen”. Cette structure permet de traiter l’ensemble des sujets liés à la transmission d’entreprise. »
Christophe Chausson, directeur opérationnel de Nebopan
Justement, pour accompagner cette nouvelle génération de jeunes ou futur.e.s dirigeant.e.s, quelles sont les actions que mène Nebopan ?
C. G. : Nous venons de mettre en place une structure baptisée “New Gen” (pour “Nouvelle Génération”) qui réunit pour l’instant une quinzaine de membres. La plupart d’entre eux exercent déjà une fonction de direction ou opérationnelle dans leur entreprise familiale respective. Mais “New Gen” s’adresse aussi aux enfants de nos associés qui font actuellement des études ou sont en alternance, et envisagent de prendre la succession de leurs parents.
L. A. : Sur les 26 associés que compte actuellement Nebopan [si l’adhérent suisse Boissec n’est resté que quelques mois, un 27e membre doit rejoindre le groupement courant 2026 : Ndlr], nous avons identifié à ce jour vingt entreprises où la question de la relève se pose dès maintenant, ou se posera au cours des prochaines années. Le but est d’anticiper et d’accompagner ce mouvement.
C. C. : En fait, “New Gen” s’apparente à un club de réflexion, à un nouveau groupe de travail en quelque sorte – au même titre que nos commission achats, social/RH, etc. Plusieurs volets y sont abordés, notamment sous l’angle de la communication. Par exemple : comment ces jeunes ou futur.e.s managers peuvent instaurer un dialogue constructif avec les équipes internes lorsque l’on est “fils de… ou “fille de…” ; quels peuvent être les parcours de formation et d’intégration. Ce lieu est aussi un moyen de les rassurer, voire de les conforter dans leur choix.
« Pour refléter la philosophie et l’état d’esprit de Nebopan, nous parlons maintenant d’associés au lieu d’utiliser le terme d’adhérents. »
Christophe Genson
L. A. : Jusqu’à présent, un parcours d’intégration existait déjà au sein du groupement. Avec “New Gen”, nous le formalisons. Il sera un passage obligé pour les jeunes qui pourront occuper les différentes fonctions dans un négoce et dans plusieurs entreprises membres de Nebopan. C’est aussi e lieu d’accompagnement va aussi permettre de recueillir et d’analyser les différentes problématiques auxquelles nos jeunes pourraient être confrontés.
C. G. : La première réunion “New Gen” s’est tenue le 7 novembre dernier au sein de l’entreprise Ratheau, l’une de nos trois associés de la région parisienne. Elle a permis de constituer un noyau dur d’une quinzaine de jeunes dont la plupart a entre 17 et 35 ans. D’une façon générale, les actuels dirigeants des entreprises familiales ont d’ores et déjà suscité l’envie de leurs enfants de venir y travailler.
Au sein de votre groupement, la notion de membres associés s’est substituée à celle d’adhérents. Pourquoi ce changement de sémantique ?
C. C. : C’est un terme que nous utilisons depuis six mois. Il reflète beaucoup mieux la réalité de ce qu’est Nebopan. Nos 26 associés sont tous au capital du groupement et siègent tous au conseil d’administration.
C. G. : Ce changement peut sembler anodin. Mais, en fait, il s’agit de clarifier et validation la confiance mutuelle et sans faille entre toutes les composantes de Nebopan. Chaque membre du réseau doit s’investir et s’engager dans la vie du groupement.
Dans le cadre de votre plan stratégique “Vision 2030”, une charte a été mise en œuvre à l’attention des associés. Quels en sont les objectifs ?
L. A. : À travers “Vision 2030”, Nebopan souhaitait notamment formaliser les droits et devoir de chacun de ses membres avec des règles de conduite claires et transparentes. Ce document reflète le bienfondé du groupement, ses valeurs pour garantir sa pérennité.
C. C. : C’est aussi la synthèse de notre Guide Nebopan. La charte s’articule autour de dix droits et dix devoirs en vue de décliner l’ensemble des dossiers, actions et services traités par nos six groupes de travail internes.
C. G. : C’est par ailleurs l’un des trois leviers qui ont été définis fin 2024 pour élaborer le plan “Vision 2030”. La charte fait partie des trois leviers prioritaires que nous avons commencé à actionner.
L’un de ces trois piliers concerne la démarche RSE. Où en est ce dossier ?
C. C. : Les grands axes ont été validés par tous nos associés qui devront avoir rédiger leur rapport de durabilité d’ici à l’été 2026 ou au plus tard à la rentrée prochaine. Certains sont prêts à l’image de à de Biemar en Belgique labelisés ÉcoVadis [médaillé d’or en août 2025 : Ndlr] ou du belge Martens qui est aujourd’hui en conformité avec la directive européenne CSRD.
L. A. : Certaines de nos sociétés de taille régionale ou multirégionale ont d’ores et déjà engagé un travail en ce sens. En revanche, les entreprises de moindre envergure ont exprimé le besoin que nous les accompagnons concrètement et leur apportons toutes les clés pour structurer et formaliser leur démarche.
« Dans un contexte économique sous tension, la création de notre financière Nebofi va notamment permettre, le cas échéant, de soutenir la trésorerie des associés dont le besoin se ferait sentir. »
Laëtitia Aussenac, vice-présidente de Nebopan
Autre annonce forte durant ce Nebo’Dating 2025 : la création de Nebofi. Comment fonctionnera ce levier financier ?
L. A. : Le dossier avait déjà été évoqué au sein du groupement il y a une dizaine d’années. Dans un climat d’affaires tendu dans le secteur du Bâtiment depuis 2022, le besoin s’est à nouveau fait ressentir de disposer d’une financière. Elle sera opérationnelle à 100 % courant 2026. Les 26 associés apporteront leur contribution dans le capital de Nebofi selon leur poids en termes de chiffre d’affaires. Dans un contexte économique compliqué, Nebofi sera un levier essentiel pour assurer la pérennité et l’indépendance de notre groupement.
C. G. : La holding Nebofi a d’abord vocation à éviter toute dilution au sein du groupement dans un marché des bois et dérivés où la concurrence est devenue exacerbée. Elle permettra d’intervenir et d’accompagner un associé qui se positionnerait en vue de reprendre un confrère n’ayant pas, par exemple, de repreneur en interne.
C. C. : Nebofi doit aussi permettre, le cas échéant, de soutenir la trésorerie des associés dont le besoin se ferait sentir. Là, il est question d’éviter d’éventuels rachats par des concurrents intégrés ou indépendants. L’autre volet de la financière concerne la transmission d’entreprise à l’heure où la deuxième génération de dirigeants s’apprête à partir en retraite ou prépare cette étape.
Sur le volet formation, votre école interne ÉBENe pourrait-elle être amenée à concevoir des modules spécifiques pour répondre aux enjeux auxquels sont ou seront confrontés les futur.e.s jeunes dirigeant.e.s ?
C. C. : Pas du tout. C’est la mission de “New Gen”. À plus ou moins brève échéance, cette structure traitera tous les aspects financiers, fiscaux et patrimoniaux liés à une transmission d’entreprise. Y seront organisées des sessions d’information, de sensibilisation, de partage et de retour d’expérience. Concernant ÉBENe qui a été relancé en 2019, sa mission consiste à former les équipes internes aux questions liées aux techniques et métiers du bois. Un tiers des modules traite les aspects commerciaux et de management (chef.fe.s d’agence par exemple). En parallèle d’un format court de formation d’un à deux ou trois jours (commerce, digital…), le format long de sept mois permet de délivrer deux CQP [certificats de qualification professionnelle] de la FDMC : l’un pour les ATC, l’autre au titre de vendeur interne.
C. G. : La 5e promotion d’ÉBENe (2025-2026) baptisée “Egger-Lignalpes” – deux de nos fournisseurs qui en sont les parrains – s’est ouverte en octobre dernier avec un effectif de dix stagiaires. Nous réfléchissons avec la FDMC à faire évoluer ces deux CQP.
ÉBENe intègre-t-elle l’IA dans les process de travail des collaborateurs de vos associés ?
C. C. : Ce sujet y est traité depuis 2023. Le but consiste à apporter le maximum d’éléments pour que chacun puisse faire ses premiers pas avec les outils d’IA générative, que ce soit pour une fonction support ou opérationnelle en agence.
« À fin novembre 2025, nous sommes sur une tendance de CA comprise entre +0,5 % et +1 % à périmètre constant. »
Laëtitia Aussenac
Envisagez-vous d’intégrer une “brique” d’IA dans les outils digitaux du groupement, notamment au niveau des ERP ?
C. C. : Des réflexions sont en cours. Encore faut-il disposer de la data qualifiée. Ce qui n’est pas forcément évident dans nos métiers lorsqu’il est question, entre autres, de produits issus de la première transformation. De même que le déploiement d’un ERP commun entre nos 26 membres n’est pas à l’ordre de jour. En revanche, Nebopan souhaite encore améliorer et optimiser les capacités de leur ERP respectif grâce à l’IA – ce qui doit fluidifier encore mieux les parcours clients.
Face à une conjoncture sous tension, comment se comporte l’activité du groupement ?
L. A. : Nous sommes sur une tendance en valeur comprise entre +0,5 % et +1 % (à périmètre constant) à fin novembre 2025. C’est plutôt une bonne performance au regard du climat des affaires en général, d’autant que l’effet prix est resté assez modéré en 2024, voire stable en fonction des familles de produits.
C. C. : En revanche, les volumes demeurent globalement sur une tendance baissière : de l’ordre de -3 % à -5 % selon l’univers produits. Par exemple, l’activité en agencement se comporte encore relativement bien, tandis que les bois de structure continuent de souffrir.
C. G. : Cela dit, certains signaux laissent à penser qu’il pourrait y avoir de nouvelles hausses tarifaires, notamment en bois de structure – ce qui devrait, dans l’absolu, impacter positivement les chiffres d’affaires… Quoi qu’il en soit, le marché des bois, panneaux et dérivés s’avère nettement moins impactés par rapport aux autres matériaux de construction qui sont assez dépendants de la construction neuve.
C. C. : Il est intéressant de constater que l’activité de nos quatre associés belges – Biemar, Carlier Bois, Hout Luyten et Martens : soit 10 % à 15 % du CA ventes consolidé de Nebopan – est un bon indicateur pour leurs collègues français. Alors qu’ils avaient beaucoup plus souffert en 2023 comparé à la France, leurs marchés ont renoué avec une bonne dynamique depuis quelques mois. Sachant qu’il existe toujours un décalage entre nos deux pays, la reprise d’activité en Belgique pourrait augurer de la fin du trou d’air ou d’un début de sortie de crise dans l’Hexagone.