
« Nous restons dans une stratégie d’ultra-conquête »

Crise du Bâtiment, moratoire sur MaPrimeRénov’, TVA à 5,5% pour le photovoltaïque en octobre 2025, problématique pour ne pas trop éroder les marges, feuille de route stratégique Odyssée… À la tête de l'enseigne phare du groupe Martin Belaysoud, Didier Flavenot livre son analyse du marché. Avec un regard plutôt circonspect sur la conjoncture.
Depuis dix-huit mois, la filière subit les méandres réglementaires et les ménages gèlent leurs intentions d’achat. Résultat : le CA 2024 de Téréva (hors activité inter-filiales) s’est élevé à près de 600 M€, mais nous avons surperformé le marché. L’incertitude se poursuit en 2025. La politique du stop & go de l’État ne contribue pas à remonter la pente. Ce qui impacte entre autres les ventes de PAC air-eau qui ne redécollent toujours pas. Annoncée en mars, la baisse de la TVA à 5,5 % en octobre sur le photovoltaïque [PV] devrait venir soutenir le marché alors que les volumes se sont déjà érodés. Ce à quoi s’ajoute une déflation plus ou moins forte selon les univers produits. Avec, in fine, une guerre commerciale sur le terrain. Rien qu’en PV, les tarifs ont été divisés par quatre depuis 2021 !
Selon Coédis, l’activité des distributeurs a encore reflué au T1 2025, et à fin mai les ventes s’affichaient à -7 %. Là encore, Téréva et ses filiales font mieux que la profession malgré une conjoncture fragile. Les fédérations de notre amont entrevoient des signes de reprise dans le neuf qui, a priori, ne redeviendra dynamique qu’en 2027. La rénovation énergétique devrait se stabiliser au 2e semestre 2025 par rapport, cependant, à un 2e semestre 2024 très bas. Or il y a quelques signaux vert clair dont la remontée des transactions dans l’ancien. Mais avec des taux d’intérêt encore au-delà de 3 %, cela questionne sur la capacité des ménages à investir dans des travaux. Il est crucial que toute la filière continue de se mobiliser autour de MaPrimeRénov’. Ce qu’elles font d’arrache-pied pour redonner, notamment, un nouveau souffle au monogeste et fixer un cadre plus cohérent afin d’éviter les dérives aux rénovations d’ampleur.
« Le mix énergétique français doit être pluriel pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici à 2050. »
C’est un vrai sujet dont la profession s’est largement saisie. Il est souvent compliqué de déceler les fraudes lors de rénovation d’ampleur ou monogeste. Nous agissons en amont pour s’en prémunir. À chaque ouverture de compte, nos commerciaux rencontrent les installateurs dans leur entreprise (les visites étant obligatoires) pour déceler d’éventuels fraudeurs.
Là aussi, il n’y a pas de ligne politique claire et stable. Au Royaume-Uni, par exemple, le gouvernement a imposé la pose de panneaux PV sur les maisons neuves. Le mix énergétique français doit pourtant être pluriel pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici à 2050. La TVA à 5,5 % sur les panneaux solaires en octobre 2025 apportera, peut-être, un ballon d’oxygène au PV tout en soutenant aussi les ventes de CET, d’IRVE et batteries. Nous abordons ces marchés avec beaucoup d’ambitions.
L’un des gros chantiers en cours concerne notre future plateforme logistique de 36 000 m² basée près de Laval (Mayenne). Elle sera opérationnelle début 2026 pour desservir la trentaine d’agences du Grand Ouest. Le but est d’accroître encore le taux de service. Nous avons aussi achevé la fusion des 6 sociétés d’Anjac-CSI rachetées mi-2018. C’est un énorme investissement. Après la refonte de notre e-shop, le déploiement du nouvel ERP avec une interface web est finalisé. Nous avons aussi fait 2 rachats en 2024 : Aprosios Énergie (PV) dans le Nord-Ouest via notre filiale Ned, C-Clim [20 unités entre Toulouse et la Savoie : Ndlr] via Solipac. Enfin, tout en continuant de rénover nos agences en intégrant autant que possible les obligations du décret Tertiaire, Téréva a créé 11 points de vente et recruté un grand nombre de nouveaux commerciaux en 2024. Ce qui est très ambitieux compte tenu de la morosité actuelle de nos marchés. En fait, nous sommes dans les starting-blocks pour être opérationnels quand la reprise sera là, et dans une stratégie de croissance externe. Nous examinons encore, en ce moment, quelques dossiers.
Toute la chaîne de valeur se bat pour absorber les coûts (inflation, RE 2020, normes…). La meilleure des alternatives à nos yeux pour pérenniser nos marge, y compris celle de nos installateurs, est de pousser au maximum nos marques propres. À l’instar d’Aquance (sanitaire), notre MDD Bourgeois Global (solaire résidentiel et petit tertiaire), très compétitive au niveau prix, est une alternative aux marques premium qu’il faut prioriser. Mais elle permet de préserver les marges de l’installateur et soutenir le marché.
Notre groupe a intégré différentes couches d’IA notamment en back-office (logistique, CRM pour analyser les comportements clients…). C’est devenu un guichet unique de datas pour nos commerciaux. Comme à l’arrivée du digital en son temps, nous embarquons les équipes. Le comité exécutif du groupe a d’ailleurs organisé mi-juillet un séminaire sur l’IA. Mais attention ! Ce n’est pas “laˮ solution miracle car le négoce est très incarné sur le plan des relations humaines.
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